Articles de FloOk - I. L'APPARITION DE MILLIANNE
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I
 
 
 
 
 L'APPARITION DE MILLIANNE
 
 
 
 
 
Le silence qui précède la fin de la nuit…
 
 
 
 
 

J'étais assoupi dans un lit de l'auberge de Tranchecolline, un petit village Orc en Kalimdor.

 

Oui, parce que je suis un Orc, fier représentant de cette race appartenant au camp de La Horde, ennemie de l'Alliance depuis des temps immémoriaux. J'appartiens également à la caste des démonistes, ceux-là qui ont cultivés les forces des ténèbres et du feu pour développer leurs pouvoirs maléfiques et destructeurs.

 

Avant mon éveil je fis un cauchemar. J'avais l'impression d'être dans la réalité, tel un rêve éveillé. C'était le noir total, et je sentais une menace effrayante qui rôdait autour de moi. J'avais peur, terriblement peur, d'autant que je me sentais vulnérable, étant totalement paralysé. Cette force maléfique pénétrait jusqu'au plus profond de mon esprit, le sondant avec une facilité déconcertante, et touchait à mes peurs les plus fortes et les plus enfouies de mon esprit.

 

J'avais le sentiment que cette menace latente pouvait à tout moment se muer en attaque physique, ou en torture psychique, ou quoi que ce fût d’épouvantable, me sentant totalement à sa merci. Je ne sus combien de temps dura cet inquiétant cauchemar, mais au moment de mon éveil, j'eus la nette sensation qu'il se prolongea pendant quelques instants dans la réalité, pour disparaître enfin.

 

Retrouvant l’usage de mes membres, je m'assis sur le lit. Au fur et à mesure que la clarté du jour et de l'éveil gagnaient ma conscience, je réalisai peu à peu ce que je venais de vivre, et ne pus réprimer ces murmures :

 

- Quel horrible cauchemar...

 

Je frottai mon visage avec mes mains, machinalement, en espérant y trouver un quelconque soulagement.

 

- Pourquoi suis-je tourmenté comme ça?

 

Pourtant, ce songe effrayant m'était déjà apparu depuis peu. Les premières fois il durait moins longtemps, était relativement diffus et faiblement perceptible. La peur induite par cette force invisible était moins présente. Mais ces derniers temps il survenait systématiquement avant chaque réveil, puis apparaissait de plus en plus nettement, se faisant plus oppressant, et commençait même à s'immiscer dans la journée.

 

D'ailleurs j'en faisais quoi de mes journées? Mon peuple et ma guilde étaient constamment en guerre, et je ne faisais rien d'autre que guerroyer de ci, de là, ayant abandonné depuis longtemps l'espoir d'un répit dans les multiples batailles que nous menions. J'appartiens à la guilde La Horderie, dont le Chef est Anaxagor, à qui je juera fidélité le jour où je rejoignis sa vénérable corporation. Encore avant, à la fin de mon adolescence, je rendis également allégeance à Thrall, le grand chef de guerre Orc en personne, qui parvint à unifier toutes les forces des Orcs, des Taurens, des Trolls ainsi que celles des Morts-vivants pour lutter contre les forces de l'Alliance.

 

Tout en m'habillant, je m'efforçais à toutes ces pensées dans l'unique but de me rattacher à quelque chose de familier, appartenant à mon histoire, pour tenter d'échapper à ces visions, épouvantables malgré les nombreux carnages auxquels j'avais participé. Je décidai alors de sortir de l'auberge, en espérant que cela me changerait les idées, et ferait disparaître ces rêves inquiétants.

 

Si fait, je tombai quasiment nez à nez avec une personne que je connaissais depuis toujours, et ce de façon totalement inattendue. C'était Millianne, le Chef de ma toute première guilde, celle qui vit naître mon enfance, passée à apprendre à me battre et étudier la démonologie, pour finir au service de La Horde.

 

- Salut FloOk, dit il avec simplicité et gentillesse.

 

D'ailleurs sa façon de le dire était surprenante, d'autant que je ne l'avais pas vu depuis des années. Pour être plus précis je ne l'avais jamais revu depuis que sa guilde, Les Larmes d'Azeroth, avait été dissoute pour être fusionnée avec sept autres, fondant la nouvelle guilde, plus grande et plus puissante. Je n'avais plus eu de nouvelle de lui depuis. Il avait tout simplement disparu. Certains disaient qu'il était mort au combat, d'autres qu'il avait été assassiné, mais ce n'étaient que des rumeurs. C'est pourquoi je lui répondis, éberlué :

 

- Millianne ? C’est toi ??

 

Avec condescendance et compréhension, il me répondit sur le même ton aimable et bienveillant :

 

- Et oui, c'est moi.

 

Un autre point - de taille - accentuait ma stupéfaction ; il était littéralement sous forme de spectre, visible que partiellement, les parties apparentes fluctuantes lentement comme des volutes de fumée. J'avais beau faire appel à mes connaissances des forces de l’ombre, je ne parvenais pas à sentir ou deviner ce qui le faisait apparaître sous cette forme si inhabituelle. De plus, étant lui aussi démoniste, il fut – et resterait toujours – mon premier Maître de classe. Depuis il y en avait eu bien d'autres, Yamcha, Gurnak, puis Shungenja, mais les pouvoirs de Millianne restaient supérieurs à mes yeux que ceux de mes autres Maîtres. C'est pourquoi je me dis qu'il devait être en train de pratiquer des sorcelleries que je ne connaissais pas. Pour le simple mortel il était un fantôme errant entre les mondes des morts et des vivants, mais je sentais qu'il y avait plus que cela, même si je ne savais pas précisément quoi.

 

C'est pourquoi je décidai de lui poser directement la question, écartant volontairement les formules d'usages et d'amitiés :

 

- Pourquoi es tu sous forme de fantôme?

 

Sa réponse ne se fit pas attendre :

 

- J'ai pas le temps de t'expliquer, dit il avec détachement et calme, même si sa réponse sous entendait une forme d'urgence. Comme je restais coi, il poursuivit :

- Tu cours un grave danger FloOk.

- Ha bon? demandais je spontanément et de manière presque candide.

- Oui, je reviens du monde des démons que nous invoquons, et il risque d'y avoir des problèmes avec eux. 

 

En même temps qu'il m'apprit cela, je ne pus m'empêcher de penser que cela pourrait expliquer en partie sa forme éthérique. Il poursuivit :

 

- Ils veulent apparemment aller ailleurs, ou être libres, mais je ne sais...

 

A peine eut il exprimé ce début d'explication qu'il disparut presque instantanément, et le contact psychique qui nous unissait fut rompu. J'allais de surprise en surprise pour une matinée que je souhaitais dédier au repos! Mon étonnement se doubla d'appréhension. Pourquoi disparut-il si vite avant qu'il n'eut au moins le temps de finir ses explications? Quelle force avait pu le contraindre à me quitter subitement?

 

Je fus interloqué.

 

- Millianne? Je fis quelques pas devant moi, me positionnant exactement où il se trouvait lors de sa disparition, et m'exclamai :

 

- Millianne! Je courus devant moi, cherchant de droite et de gauche si je ne le percevrai point, et, ressentant un début d'angoisse, je criai :

 

- Millianne !! Où es tu ??

 

Je m'immobilisai, essayant de retrouver la maîtrise de moi-même et atténuer au possible mon trouble. Je n'eus point le temps de faire cela que j'entendis derrière moi des bruits de sabots se rapprocher. Me retournant, j'aperçois sur leur monture deux amis de guilde, Lavinya et Dargore.

 

Lavinya était une mage, de la race des Trolls, et dotée d'une grande puissance d'attaque inhérente à sa classe. En combat elle était redoutable, mais sa gentillesse était unanimement reconnue au sein de la guilde. Dargore, appartenant à la race des inquiétants morts-vivants, était démoniste comme moi. Nous appartenions à la même classe, nous étions des frères d'arme, et avions combattu longtemps ensembles. Tout cela faisait que nous étions devenus les meilleurs amis du monde. Qu'il fut mon supérieur direct n'affectait en rien nos relations, qui étaient profondes et intimes. Nous nous faisions confiance, et adorions rivaliser d'intelligence sur nos sorts et stratégies, et ce même pendant les combats.

 

Lavinya me salua :

 

- Bonjour FloOk, dit elle chaleureusement.

 

Encore sous l'effet de l'apparition de Millianne, j'essaye de retrouver rapidement une contenance, et lui répond laconiquement :

 
- Heu salut.
 

Dargore, heureux de me retrouver, prit la parole :

 

- Salut cher FloOk.

- Salutations Dargore. Tu vas bien ?

- Oui oui, ça va très bien. On va à l'assemblée de notre guilde, tu veux nous accompagner ?

- Oui, bien sur. Qui ne souhaiterait pas y aller, surtout en si bonne compagnie ? Dis-je pour feindre la convivialité et l'enthousiasme. Ils sourirent tous deux, enchantés de trouver un troisième compagnon pour accomplir la longue route qui les attendaient.

 

L'assemblée de la guilde était un évènement annuel qu'on ne pouvait manquer. Elle était organisée dans le but de faire un bilan de notre évolution, de s'informer des évènements et de la situation actuelle des mondes connus. Mais c'était aussi une occasion de se retrouver entres tous les membres, pour festoyer après les cérémonies officielles.

 

J'invoquai mon palefroi corrompu et nous partîmes en direction de Féralas, la région où avait lieu ladite assemblée. Nous traversâmes les grandes et magnifiques plaines des mythiques Tarides, sous une douce chaleur pré estivale, et fîmes une halte à La Croisée des Chemins.

 

Ralentissant le trot de sa monture, Lavinya nous dit :

 

- Nous arrêtons nous ici pour aujourd'hui les amis?

- La journée n'est pas complètement terminée, répondit Dargore. Et avec un peu de chance nous pourrions arriver jusqu'au camp Taurajo avant la nuit.

- Hum, ça fait assez loin. Ca risque de faire beaucoup, remarqua-t-elle. Nous avons déjà parcouru une longue distance.

J'émis mon opinion :

- N'oublions pas que nous n'avons que trois jours pour nous rendre à l'assemblée. Je serais de l'avis de Dargore : allons au camp Taurajo, cela nous rapprocherait, et l'auberge y est aussi bien qu'ici.

Mon compagnon abonda dans mon sens :

- Oui, et en plus il y a moins de monde là bas, nous y serions plus tranquilles.

 

Il ne parlait pas que des habitants. Il faisait surtout allusion aux risques d'attaques de la part de l'Alliance, dont la Croisée des Chemins était fréquemment la cible. Cette ville étant assez proche de Cabestan, un port neutre en liaison avec des villes de la faction opposée, les attaques y étaient toujours possibles. Tandis que le camp Taurajo était plus reculé dans les terres, et ne présentait aucun aspect stratégique ou de richesse intéressante à piller. Après quelques secondes d'hésitation, Lavinya trancha :

- Très bien, alors va pour Taurajo.

 

Après avoir bu de l'eau fraîche et s'être reposé quelques instants, nous repartîmes. Nous ne nous souciions pas de l'état de fatigue de nos montures, étant magiques elles n'avaient jamais besoin de repos. Elles étaient proprement infatigables.

 

Nous empruntâmes la Route de l'Or vers le sud, et nous arrivâmes comme prévu au fameux camp en fin de journée, le soleil devenant une grosse orange flamboyante, irradiant de ses derniers rayons les quelques bâtisses du camp.

 

Nous entrâmes dans l'auberge et commandâmes un repas et de la boisson. Comme l'avait remarqué Dargore, le camp, ainsi que l'auberge étaient presque vides. Il n'y avait que quelques habitants de la région, accoudés au comptoir, échangeant des plaisanteries, ou discutant avec calme et sagesse de leur travail, la plupart étant des fermiers. Bref, nous étions tranquilles. Nous échangeâmes quelques propos sur les évènements marquants de notre guilde, essayant de deviner par jeu quels pourraient être les sujets abordés lors de l'assemblée.

 

A la fin de notre repas, Lavinya, fatiguée par le voyage, voulut rapidement se retirer pour aller dormir. Elle prit congé de nous en nous adressant avec affection ses voeux de bonne nuit et monta à l'étage où l'attendait sa couche.

 

Je voulus profiter de me retrouver seul avec mon ami démoniste pour lui toucher quelques mots à propos de mes cauchemars :

- Il fait encore presque chaud malgré la nuit, tu ne trouves pas?

- Oui, sans nul doute. C'est très agréable.

- Ça te dit d'aller se promener un peu avant d'aller dormir?

- Ouais, pourquoi pas. Ça fera une promenade digestive, dit-il avec indolence.

 

Arrivant dehors, nous eûmes la même sensation : cette fin de journée était splendide. Il ne faisait ni trop chaud ni trop froid, une légère brise venant rajouter une touche agréable aux sens, qui couronnait la sensation de bien être. Le camp Taurajo était minuscule, composé d’une dizaine de bâtisses en tout ; l’auberge, une petite caserne d’orcs, une forge, une écurie, et le reste des habitations. Ce camp avait l’air d’être planté en pleine nature, avec un simple chemin en terre battue, partant de la route de l’Or pavée pour mener à l’auberge. Point d’autre aménagement, les maisons étant comme posées dans le décor de la grande plaine verdoyante. 

 

Après quelques pas dans ce cadre paisible, je décidai d'introduire le sujet sans détour :

- Voilà Dargore. J'ai un problème ; depuis quelques temps je fais des cauchemars épouvantables, et ça commence à m'inquiéter.

 

Il s'arrêta net, surpris par mon entrée en matière un peu abrupte, me regarda en plissant des yeux, et demanda :

- Ha bon? Quel genre de cauchemars tu fais?

- Et bien, en fait je rêve que je suis allongé dans mon lit, comme dans la réalité, et je suis paralysé. Et je sens une sorte de présence, invisible, qui tourne autour de moi et me fait peur. Comme si une entité malfaisante voulait me faire du mal ou préparait quelque chose...

 

A tout hasard, sans être sur de son fait, il m'interrogea :

- Mais, tes boucliers de protections psychiques, tu les entretiens bien?

- Et bien pourtant oui, mais cette présence mystérieuse à l'air de les traverser comme du beurre. Et pourtant elle ne fait rien d'autre que me faire peur. C'est à n'y rien comprendre.

- As tu pu identifier de quelle entité il s'agit?

- Non. Je n'en ai pas la moindre idée.

 

Il réfléchissait, cherchant une explication à mes dires. Je poursuivis :

- Et en plus il y a Millianne qui est venu me voir ce matin.

- Millianne? Tu parle du chef de ton ancienne guilde?

- Oui. Il a essayé de me dire qu'il y avait un problème avec nos démons. J'ai pas bien compris, mais il a disparut avant de finir ses explications.

- Disparu? Comme ça, subitement?

- Oui. Et il était à l'état de fantôme, comme s'il était désincarné.

- et que t'as-t-il dit d'autre?

- Pas grand chose ; il m'a dit aussi que ces démons voulaient partir, ou quelque chose comme ça, mais il n'a pas pu m'en dire plus, comme s'il devait partir d'urgence.

 

Il réfléchit à nouveau, intrigué, mais essayant d'y voir clair dans les quelques informations que je venais de lui donner. Il révisait rapidement des listes d'entités démoniaques, mais il y en avait trop, et n'en savait pas suffisamment pour se faire une idée. Il finit par dire :

- C'est assez mystérieux... Je me demande s'il n'y aurait pas un rapport entre les deux. Je veux dire entres tes cauchemars et la visite de ton ancien chef. En tout cas c'est étonnant, même s'il paraît évident qu'il a voulu te prévenir d'un danger.

- Certainement, nous sommes tous les deux d'accord sur ce point.

- Etant relativement limité à ce sujet, le mieux serait de demander à Shungenja. Il a la faculté de lire plus facilement que moi dans les couches inférieures des esprits. Et en plus on le verra à l'assemblée dans deux jours à peine.

- Oui, il n'y a plus beaucoup de temps à attendre avant de le revoir. J'espère qu'il pourra nous éclairer de ses lumières en connaissance des ombres.

 

Saisissant mon jeu de mots, il sourit, et me dit :

- Ecoutes, pour l'instant je ne sais trop quoi te dire. Finissons notre voyage, et on parlera de tout ça avec notre maître après-demain, et en prenant tout le temps qu'on voudra. Maintenant nous devrions aller dormir, si on veut tenir le choc demain.

- Oui, tu as raison. Mais j'ai bien fait de t'en parler.

- Oui oui, bien sur. Il valait mieux... acquiesça-t-il avec sagesse.

 

Entamant un demi-tour, mon supérieur fit quelques pas en direction de l'auberge, et je le suivis à ses côtés. Nous rejoignîmes nos chambres respectives, et passèrent la nuit. Pourtant, chose étrange, je ne fus pas victime de ces cauchemars cette nuit là, et me réveillai frais comme la rosée matinale.

 

Nous nous retrouvâmes tous trois devant un petit déjeuner et, sans trop tarder nous nous remîmes en route vers la région de Mulgore.

 

Pendant une demi-journée nous suivîmes la route vers l'ouest, qui obliqua ensuite vers le sud, en direction des forêts de Feralas. La demi-journée restante fut passée à traverser ses végétations assez denses, mais heureusement facilement praticables, grâce à des chemins assez bien dégagés qui nous permîmes d'atteindre un autre camp, celui de Mojache.

 

Nous fîmes halte à l'auberge, et y passèrent la deuxième et dernière nuit avant le grand jour. Là aussi je ne fus pas dérangé par mes cauchemars, et je ne m'en sentis que mieux! D'ailleurs j'en fis part à Dargore au matin, et il voulût se montrer optimiste en me disant que l'air du voyage avait du bon, mais en mon fort intérieur je n'étais pas dupe ; il voulait dédramatiser la situation pour me redonner du courage, et peut être aussi me faire oublier cela pour me préparer à l'assemblée.

 

Cette dernière commençant l'après-midi, nous eûmes toute la matinée pour parcourir les quelques lieues qui nous séparaient d'Hache-Tripes, le lieu du rendez-vous.

 
 
 
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Publié le 18/01/2009 - Pas de modifications
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