Articles de Edualk - Fugue en rage majeure
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Chapitre 28 : A consommer avec modération

 

 

- RHHHAAA !!! Par la malepeste ! Encore un qui n'a pas de langue ! C'est quoi ce pays pourri ?!

- Respirez, Maître, vous devenez bleu.

 

Llégion fila un coup de pied rageur sur le cadavre de l'ours qu'il venait de tuer. Enfin, que Mezz venait de tuer, aidé par les sorts de son Maître.

Comme à son habitude maintenant, Abatik s'était confortablement installé dans le capuchon du Démoniste, et observait la scène en se retenant de rire.

Ne manquait que Seln au tableau, qui était restée à Moulin de Tarren.

 

Le petit groupe était arrivé la veille au village de la Horde situé au cœur de la région de Hautebrande. Llégion l'avait découvert quand il s'était rendu au Viaduc de Thandol, et avait soigneusement noté sa position pour y retourner plus tard.

Estimant en avoir eu plus qu'assez des Tarides, de son soleil torride et de sa faune hostile, Llégion s'était décidé à changer de continent. Et puis, c'était toujours mieux que de retourner à Orgrimmar, trop encombrée ces temps-ci.

 

Le village de Moulin du Tarren était étonnement peuplé pour un "trou" perdu en pleine campagne. Sentant en Llégion le pigeon de service, les habitants s'étaient quasiment jetés sur lui pour lui demander mille et un services - dont ramener dix langues d'ours.

D'où l'agacement, pour ne pas dire plus, du Démoniste en constatant que, encore une fois, l'ours qu'il venait de tuer n'avait pas de langue.

 

- On en est à combien, Abatik ?

- On a... quatre langues, Maître. Pour vingt-sept ours tués. A ce rythme-là, il nous faudra en tuer encore... une quarantaine pour avoir le quota.

- (voix caverneuse) Et je dois vous signaler, Maître, que depuis que nous sommes arrivés ici, la population oursine a manifestement beaucoup diminuée. Nous risquons l'extinction.

- Rien à foutre. En plus, je n'ai jamais pu saquer ces saletés. Par contre, on risque de se retrouver à court de fournisseurs de langues...

- Encore heureux que Seln ne soit pas là, Maître.

- Effectivement...

 

Seln avait été folle de joie quand elle avait appris que le petit groupe quittait les Tarides. Même si elle avait commencé à bien s'entendre avec une des Gobelines de Cabestan, l'absence criante de boutiques lui portait de plus en plus sur les nerfs. Elle avait même sauté au cou de Llégion, qui ne s'y attendait pas et rata ainsi une occasion peut-être unique de poser les mains sur la Succube.

Oui, quand ça veut pas, ça veut pas...

Par contre, elle s'était mise à faire la tête en apprenant leur destination, qui passait nécessairement par Fossoyeuse.

 

- Oh nonnnn... Mais chéri, Fossoyeuse est TELLEMENT sinistre. Et il y a TELLEMENT peu de boutiques. Et puis, c'est TELLEMENT sombre. Alors que Lune d'Argent est TELLEMENT fashion ! Pourquoi on n'y va pas, mamour ? Tu m'avais dit qu'on irait à Lune d'Argent ?

 

Llégion avait assez vite pris le pli avec elle. Il suffisait de la laisser se plaindre et elle finissait par se mettre à bouder et à le laisser tranquille. Pas très élégant, mais efficace.

 

Mais quand il lui avait dit qu'ils ne faisaient que passer par Fossoyeuse, pour se rendre dans un trou paumé en Hautebrande, Seln avait eu une réaction, disons... instinctive.

Elle lui avait collé une gifle magistrale et avait cessé de lui parler. Ce qui faisait le bonheur de Llégion, car il pouvait ainsi souffler. Sauf pour la gifle, car on a sa fierté après tout.

 

Arrivés à Moulin de Tarren, Seln s'était installée à l'auberge avec un stock de chocolats fourrés au soufre et s'était enfermée dans sa chambre, laissant le Démoniste accompagné d'Abatik et de Mezz massacrer la faune locale.

La bouderie durait depuis maintenant une semaine, et Llégion commençait quand même à s'inquiéter un peu. Même si ses expéditions dans la région lui prenaient tout son temps.

 

- Bon, on fait une pause, les gars. On va se changer les idées. On a quoi encore à faire pour les pignoufs, Abatik ?

 

Le Diablotin sortit une liste et un crayon.

 

- Il y a le village de paysans de l'Alliance où on doit tuer des types, Maître.

- Mouais… Je commence à m'en lasser, du massacre d'innocents. Ensuite ?

- Vous avez les truands dans leurs ruines, Maître. En plus, on devient copain avec les voleurs de Ravenhold.

- Rien à foutre. Rien d'autre ?

- Et bien… bien sûr, il y a les Gnolls et leurs champignons, Maître...

 

Les Gnolls et leurs champignons... Llégion sentit un frisson lui parcourir l'échine.

 

La mission que l'alchimiste de Moulin du Tauren lui avait donné était simple : récupérer des champignons dans un champ annexé par une bande de Gnolls, pour pouvoir réaliser une de ses potions.

Enfin, officiellement.

Car Llégion avait en réalité mis le pied dans un véritable nid de frelons.

 

Les champignons en question étaient soudainement apparus quelques mois plus tôt dans le champ d'une modeste famille de Hautebrande, suite à une pluie étrange venue des Maleterres. Bleus translucides, légèrement transparents, d'une taille peu commune, ils s'étaient révélés puissamment hallucinogènes une fois convenablement préparés.


La famille qui les avait goûtés n'avait pas décollée pendant trois jours, et après avoir retrouvé ses esprits, le père avait immédiatement prévenu la petite colonie naine installée au sud du Mur de Thoradin pour qu'ils les lui enlèvent.

Vétéran de plusieurs guerres et naturellement prudent, le brave homme avait tout de suite vu en cette nouveauté une formidable source d'ennuis pour lui et les siens, d'où sa décision.

 

Malheureusement, l'homme avait misé sur le mauvais cheval – ou plutôt le mauvais poney, comme dirait Llégion… (Seln ne se lassait pas de ce bon mot…).

Le chef des Nains n'était qu'une crapule, exilé par les siens dans ce coin perdu. La petite famille eut un "accident" – un truc idiot, leur chariot fut "malencontreusement" écrasé par un char de guerre tombé d'un arbre.

Oui, ça arrive, la preuve…

 

Mais les Nains n'avaient pas été assez rapides. La nouvelle s'était répandue, et une petite bande de Gnolls avait mis la main sur le champ pendant que leurs "concurrents" s'escrimaient à installer un char dans un arbre au dessus de la route…

Les chefs des deux groupes étaient du genre retords et calculateurs. Plutôt que de s'entretuer, ils avaient conclu un accord destiné à assurer à chacun une part honnête des bénéfices : les Gnolls exploitaient le champ, et revendaient leur production aux Nains qui se chargeaient de l'écouler.

 

Llégion avait donc tenté de s'infiltrer dans le champ suite à la demande de l'alchimiste. Il s'était rapidement fait tuer par une demi-douzaine de chamans Gnolls complètement défoncés mais néanmoins très efficaces.

Suite à cette mésaventure, Llégion était retourné voir l'alchimiste pour avoir des explications et des précisions. Une fois bien secoué par Mezz, il avait alors révélé avoir été envoyé par ses collègues de Fossoyeuse pour récupérer ce trafic à leur profit exclusif.

 

Le Démoniste n'avait pas du tout apprécié que lui, le futur Maître du monde, se fasse manipuler par un minable trafiquant de drogue. Après de longues négociations, et l'aide de Mezz et du Code Pénal Démoniaque (la version intégrale, celle en trois volumes), Llégion avait réussi à obtenir un pourcentage sur l'affaire.

Restait à nettoyer le champ, tâche rendue difficile par le renforcement des lieux suite à sa visite "meurtrière".

 

D'où le frisson du Démoniste. Tuer des Gnolls, ou tout autre créature d'ailleurs, ça allait. En affronter une dizaine d'un coup, ça devenait un peu plus délicat, même pour 20% de part.

 

- On va plutôt attendre encore un peu, Abatik. Le village des ploucs me paraît plus intéressant.

- Vous voulez tuer de braves paysans innocents, Maître ? Mais ils ne vous ont rien fait…

- Justement…

- Z'êtes vraiment mauvais, Maître. C'est un honneur de vous servir.

- Et on ne repassera pas par la boutique de colifichets t'acheter ce nœud papillon à paillettes, Abatik. N'insiste pas.

- Mais Maître-eeeuuuhhh…

 

 

Moustaches prit mentalement note de s'occuper de cette histoire de champignons plus tard. Il n'aimait pas ce genre de méthodes, mais après tout, la fin justifiait les moyens.

Puis le rat vomit sur le cadavre de l'ours.

 

 

***

 

 

Chapitre 29 : Le bras de fer

 

 

- Salutations, l'ami ! Oups, désolé…

 

Edualk secoua la main pour chasser la douleur. Il avait frappé violemment sur le dos de Vimayre, ce qui d'ordinaire fracassait la victime, mais sur un Tauren…

 

- Ravi que vous ayez pu vous déplacer, messire.

 

L'Humain et le Tauren s'assirent autour de la table et se jaugèrent du regard.

 

Le Paladin n'avait pas l'air bien équipé, mais quelque chose en lui poussait Vimayre à la méfiance. Il avait l'air trop minable pour l'être vraiment. Et son regard ne se détournait pas.

 

Edualk rompit la glace le premier.

 

- D'ordinaire, je ne fraye pas avec ceux de la Horde, sauf quand je me fais démolir sur les champs de bataille d'Alterac ou de l'Oeil du Cyclone, mais j'ai cru comprendre que vous êtes une sorte de fonctionnaire, c'est ça ?

- Je suis Contrôleur Principal pour la Confrérie des Collecteurs.

- Ah. Les impôts.

- Votre équipement ne semble d'ailleurs pas avoir le cachet réglementaire, messire…

- En effet, ce cachet n'est pas obligatoire pour de l'équipement d'occasion, ou fabriqué pour son usage personnel. Et la charte de ma Guilde me couvre au plan juridique.

 

Les deux adversaires se regardèrent en silence. La partie était serrée, ils s'en rendaient compte, et dans l'auberge de Baie du Butin, un grand silence s'était fait autour d'eux.

 

- Je suis chargé de mettre à jour un dossier, messire. Concernant votre arrière grand-oncle. Llégion, vous connaissez ?

 

Edualk le regarda droit dans les yeux, sans ciller.

 

- Pas du tout. D'une part, je suis trop jeune pour connaître mes aïeux directement, et d'autre part, un certain nombre de ceux-ci ont fait l'objet de procédure en reniement. Votre dossier doit certainement le mentionner…

 

Edualk avait pris une voix fielleuse. Vimayre ne se démonta pas.

 

- En effet, notamment votre père, si mes renseignements sont bons.

 

Edualk leva un sourcil et sourit.

 

- Il y a en effet un homme du nom d'Arrsène qui a été renié par mon grand-père quand il a rejoint la Confrérie des Défias. Je croyais d'ailleurs que celle-ci avait des liens avec votre confrérie, non ?

 

Vimayre sourit lui aussi.

 

- De simples rumeurs, vous savez ce que c'est…

 

Un nouveau silence se fit, qui fut rompu quand l'aubergiste fit tomber un verre par terre. Les deux adversaires le fusillèrent du regard, l'obligeant à se réfugier dans l'arrière-salle.

 

- Bon…

- Bien…

 

Vimayre et Edualk se regardèrent à nouveau, cherchant à évaluer la force de l'autre. Le Tauren, moins expérimenté que l'Humain, décida de céder le premier.

 

- Ecoutez messire, Llégion a plus de 50 années de retards sur ses impôts, sans compter ses dettes du temps où il était encore en vie. Il n'a plus de lien avec vous ou quiconque de sa famille, donc notre organisation ne peut en aucun cas se retourner contre vous. Alors aidez-moi, je vous prie.

- C'est la famille, non-juridiquement parlant. Je ne livre pas ma famille, même non-juridique.

 

Vimayre pesta intérieurement. S'il n'avait pas précisé "non-juridique", il aurait pu l'avoir, mais le bougre était malin.

Moins bête qu'il n'en avait l'air, le bougre…

 

- Donc… ?

- Il n'y a pas une prime de prévue pour ceux qui vous aident ?

- Je n'ai pas souvenir…

- Article 272 alinéa 4. Ou un truc de ce genre.

 

Vraiment moins bête…

 

- Maintenant que vous le dites… 5% du redressement il me semble…

- 10% en réalité.

- … 10%, vous avez raison, suis-je bête. Alors… ?

- Je ne sais pas où il est maintenant, mais je ne serais pas surpris, vu que c'est un Démoniste et un Mort-Vivant, qu'il se soit rendu à Fossoyeuse après notre rencontre, histoire de récupérer un nouveau démon. Mais ce n'est qu'une hypothèse, bien entendu.

- Bien entendu, messire.

 

Le Tauren et l'Humain se regardèrent à nouveau en silence.

 

- Par curiosité, vu que je n'ai aucun lien juridique avec ce Mort-Vivant, vous allez lui faire quoi quand vous l'aurez retrouvé ?

- Il subira un redressement de niveau 4.

- Ce qui signifie ?

- Vous ne voulez pas le savoir. Croyez-moi, messire.

 

Edualk hocha la tête, puis à la grande surprise de Vimayre, sourit.

 

- Le pauvre vieux ! Quand ça veut pas, ça veut pas…

- Vous n'avez pas l'air si désolé, finalement.

 

Edualk plissa et les yeux en continuant de sourire.

 

- Je vais vous donner un conseil, monsieur le Contrôleur Principal. Conseil que je me permets de vous recommander de ne pas oublier. Dans notre famille, même au sens non-juridique, on n'est peut-être pas doués, mais on est du genre coriace. Très coriace.

 

Vimayre hocha la tête.

 

- J'en prends bonne note, messire.

- Et vous payez les consommations. Frais de déplacement.

- Bien entendu.

 

 

Très loin de là, Moustaches secoua la tête pour remettre ses idées en ordre. D'abord la Succube, puis ça… Heureusement que le Paladin avait tenu, sinon…

Puis le rat pissa contre un mur de passage.

 

 

***

 

 

Chapitre 30 : La rage du feu…

 

 

Llégion eut une grimace. Il avait soigneusement préparé l'opération, mais là, il se sentait soudainement minable.

Et passablement énervé.


Devant lui, installés juste à l'entrée du gouffre de Ragefeu, un Druide et un Chasseur Elfes de la Nuit affûtaient leurs armes. Une demi-douzaine de cadavres d'Orcs jonchaient le sol devant eux.

 

- Par la malepeste ! J'arrive pas à le croire ! Le jour où je décide d'aller nettoyer ce satané gouffre, y'a deux pignoufs de l'Alliance qui font un raid sur Orgrimmar. Et bien sûr, pas un garde ne bouge, à croire qu'ils le font exprès !

- (voix caverneuse) Il me semble que cela est autorisé par le Code, Maître. On ne peut rien dire…

- Déjà qu'ils m'ont pourri la vie dans les Tarides avec leurs attaques toutes les trois minutes, voilà qu'ils me suivent jusqu'ici ! J'en ai ras-le-bol !

- Respirez, Maître, vous devenez bleu. De toutes façons, ils n'ont pas l'air de vouloir vous attaquer. Vous devez leur paraître trop mina… trop fort pour eux.

 

Llégion jeta un regard noir au Diablotin qui prit un air innocent.

 

- Bon, inutile de rester traîner, on y va. Mezz, tu passes devant. Abatik, tu profites de notre petite virée pour me retrouver Seln. Ca fait deux jours qu'elle a disparu et je n'aime pas ça…

- Pas d'inquiétude, Maître. Je m'en occupe. Elle ne peut pas être bien loin, elle vous est liée.

- (voix caverneuse) Et puis-je connaître nos objectifs, Maître ?

- On entre, on tue tout ce qui bouge, on pille les corps. Ah oui, on doit aussi retrouver un de ces foutus Taurens qui s'y est paumé. Mezz, tu les cognes, moi je reste à l'arrière. Un commentaire ?

- (voix caverneuse) Le Code…

- J'ai vérifié, Mezz, c'est non seulement autorisé mais aussi obligatoire. Clause d'instance, ils appellent ça. Et tu n'as plus de formations ou de récup' à poser.

- (voix caverneuse) … Vous n'êtes pas sensé vous occuper de ces choses-là, Maître. C'est mon travail…

- N'empêche que tu viens avec moi et que tu passes devant.

- (voix caverneuse) Oui, Maître. Mais j'attire votre attention sur la pause réglementaire…

- C'est prévu : une pause tous les quarts d'heure pour récupérer, en plus, j'en aurai aussi besoin.

 

Mezz poussa un grognement. Si maintenant son Maître se mettait à s'intéresser à la loi des Enfers…

 

Abatik leur fit de grands signes de la main alors que le Démoniste et son serviteur pénétraient dans le gouffre, sous le regard goguenard des deux Elfes de la Nuit.

 

Moustaches, quant à lui, avait décidé de les suivre. Non qu'il y ait quelque chose de particulier à y faire, mais il avait deux-trois bricoles à vérifier avec un certain démon…

 

 

 

 

Ragefeu. Ce nom faisait frémir les jeunes aventuriers qui arrivaient tout juste à Orgrimmar. Mais passés les premiers émois, le lieu devenait beaucoup moins intéressant. Les comploteurs Orcs qui s'y étaient installés se révélaient vite trop peu dangereux pour menacer la stabilité de la cité.

Surtout avec tous ces jeunôts qui écumaient les lieux en permanence, sans parler des vétérans qui ne rechingnaient pas à nettoyer les lieux entre deux raids sur Hurlevent.


Mais le lieu présentait quelques avantages pour ceux qui, comme Llégion, avaient l'intention de rester dans les bonnes grâces des dirigeants de la ville.

 

- (voix caverneuse) Quatre.

- Qu'est-ce que tu dis, Mezz ?

- (voix caverneuse) C'est la quatrième fois que nous mourrons, Maître.

- Ce coup-ci, c'est de ta faute, Mezz. Je t'ai dit d'attaquer ce Gnoll, pas de rameuter la moitié de sa tribu !

- (voix caverneuse) J'étais obligé de passer par eux pour atteindre la cible, Maître.

- Par la malepeste ! Il te suffisait de sauter dans le trou, Mezz ! Et moi, je restais en hauteur à les bombarder ! Tu es nul !

- (voix caverneuse) Cela ne m'a pas paru adéquat, Maître.

- Dis plutôt que tu as le vertige ! Rhhhaaa ! Par la malepeste ! Et on y était presque ! Je déteste me taper le chemin à pied depuis ce satané cimetière !

- (voix caverneuse) Où allons-nous maintenant, Maître ?

- Tu vois les Orcs là-bas ? Avec les Démonistes et les guerriers ? On se les fait.

- (voix caverneuse) Oui, Maître. (en aparté) Pourquoi ai-je posé la question…

 

Llégion et Mezz eurent le temps de mourir encore trois fois. Les Orcs, bien que de faible niveau, étaient nombreux, et les patrouilles incessantes. Et puis il y avait eu l'assaut contre l'invocateur…

 

- Mezz ?

- (voix caverneuse) Désolé, Maître. Mais c'était le chemin le plus court.

- Non. Le chemin le plus court, c'était celui où tu sautais de la corniche.

- (voix caverneuse) C'était haut, Maître…

- Deux mètres, Mezz. J'appelle pas ça haut. Surtout pour un démon des Enfers.

- (voix caverneuse) Je risquais de me blesser, Maître, et donc d'être immobilisé. L'ennemi vous aurait alors attaqué.

- Mezz… Ils m'ont attaqué. Parce que tu as rameuté la moitié des effectifs ennemis. Et je suis mort, Mezz. Ca commence un tantinet à me GONFLER SERIEUSEMENT, PAR LA MALEPESTE !!!

- (voix caverneuse) Puis-je vous suggérer de reprendre votre respiration, Maître ? Vous commencez à prendre une teinte bleutée.

- Tu as raison, je suis calme, zen, tout va bien PAR LA MALEPESTE !!! Cool, zen, lexomil.

- (voix caverneuse) Les cours de yoga de Selneri semblent vous faire du bien, Maître. Vous paraissez plus serein.

- Mezz ?

- (voix caverneuse) Oui, Maître ?

- Ta gueule. Et on y retourne. On a encore un de ces types à éliminer, et on sort.

- (voix caverneuse) Vous parlez de celui sur la corniche, Maître ? Là-haut ?

- RHHHAAA !!! PAR LA MALEPESTE !!!

 

 

Moustaches secoua la tête d'un air navré. Il avait eu les informations qu'il cherchait, mais ces deux-là manquaient décidemment de discrétion.

Puis le rat pissa sur les bottes du Démoniste.

 

 

***

 

 

Chapitre 31 : Fossoyeuse

 

 

- Tu disais, petit ?

 

Vimayre avait d'emblée choisit d'adopter un profil bas, vu que la maîtresse des Démonistes de Fossoyeuse appartenait à la hiérarchie de la Confrérie.

Foutus Morts-Vivants…

 

- Veuillez me pardonner, Madame, mais je suis chargé par la Confrérie d'un dossier YZO-17.

- Et en quoi cela me concerne-t-il, petit ?

- En fait, Madame, notre contribuable est un Démoniste Mort-Vivant du nom de Llégion. Il est probable que vous l'ayez rencontré.

- C'est possible, petit.

- Dans ce cas, vos renseignements me permettraient de continuer à suivre sa piste, Madame.

 

La Démoniste sembla réfléchir, mais avec son regard dur et surtout vide étant donné son absence d'yeux, il était en fait difficile de savoir si elle n'était pas en fait sujette à une constipation chronique.

 

- Il est venu me voir. Un grand chauve, pas futé. Impatient et peu respectueux.

- J'espère qu'il ne vous a pas manqué de respect, Madame ?

- Tu n'aimes pas les Réprouvés, n'est-ce pas ? Je le sens d'ici. Mais ce n'est pas un problème. On te dit efficace, et tu me parais avoir toute l'hypocrisie nécessaire pour notre sacerdoce.

- Euh... merci Madame.

 

Vimayre n'était pas sûr que ce soit un compliment, mais il avait entendu dire beaucoup de mal de la maîtresse des Démonistes de Fossoyeuse par les autres Morts-Vivants de la Confrérie.

Autant dire que Vimayre avait un a priori positif sur elle.

 

- Je lui ai appris à invoquer un Marcheur du Vide. Il se nomme Mezznagma. C'est une plaie pour les Démonistes, et il a l'art de laisser des traces partout où il va.

- De quels genres, Madame ?

- Du genre syndical, petit. Cherche des manifestants, et tu trouveras ton contribuable. Et en attendant, je sais qu'il s'est rendu au Sépulcre.

- Merci Madame. Vous m'avez énormément aidé.

- Oui, vraiment hypocrite...

 

 

***

 

 

Chapitre 32 : Recherche Selneri désespérément

 

 

Quelques heures plus tôt.

 

Abatik arrêta de secouer la main quand il vit Llégion et Mezz disparaître sous le porche de Ragefeu. Puis il soupira.

 

Un Diablotin de son niveau… Multi-diplômé, avec les meilleures références des Enfers, être obligé de servir un nul pareil…

Certes, cela faisait longtemps qu'Abatik songeait à prendre des vacances.

Accompagner ce Démoniste maladroit et colérique ressemblait assez à l'idée qu'il se faisait de vacances réussies, mais parfois il se disait qu'il n'avait pas mérité un tel sort.

 

Ca m'apprendra à rendre service, pensa-t-il. La prochaine fois, le grand cornu se débrouillera tout seul avec ses histoires de Messie…

 

Enfin… Il était débarrassé pour un moment de son Maître. Mais il fallait maintenant retrouver Selneri…

 

 

La Succube avait disparu juste après leur arrivée à Orgrimmar. En fait, après que Llégion lui ai dit qu'ils allaient visiter Ragefeu. Déjà énervée, la Succube avait – encore une fois – giflé son Maître et était partie folle de rage vers les portes de la cité. Ce n'est qu'au moment de se rendre dans le gouffre que Llégion s'était inquiété de ne pas la revoir.

Surtout que, et Abatik s'était bien gardé de le révéler à son Maître, elle avait pris avec elle la moitié de son argent…

 

Abatik aimait bien la Succube. D'ordinaire, il travaillait avec des démones perverses et cruelles, terriblement orgueilleuses et surtout incapables de tenir une conversation digne de ce nom.

Selneri était très largement différente. Pas seulement parce qu'elle n'était pas diplômée, mais parce qu'elle avait manifestement un bon fond.

 

Certes, ce n'était pas l'idéal pour une Succube des Enfers. Mais elle avait quand même ce pouvoir de manipulation des mâles commun à celles de son espèce. Sauf que chez elle, cela se traduisait par ce côté boudeur et enthousiaste qui agaçait et en même temps séduisait Llégion.

Dans son genre, Selneri était plutôt douée…

Et dans le cas présent en fugue le Diable sait où…

 

Abatik réfléchit. Les gardes d'Orgrimmar l'avaient vue quitter la ville par la grande porte. Une rapide vérification auprès des Gobelins de la tour des dirigeables lui appris qu'aucune Succube solitaire n'avait pris de vol. Le regard concupiscent du responsable l'amenait à penser qu'il aurait automatiquement repéré la fugueuse…

 

Selneri n'avait pas le sens de l'orientation. Il s'en été rendu compte, ainsi que Llégion, lors de leur expédition dans les Tarides. Heureusement, Mezz avait chassé les lions rien qu'en leur montrant son Code. Les mauvaises nouvelles comme Mezz voyageaient vite, surtout depuis que les lionnes s'étaient mises en grève de reproduction…

 

Donc… elle pouvait être n'importe où. La plage à l'est d'Orgrimmar ? Un simple bout de côte désert et au sable pollué. Aucune chance qu'elle y soit.

Le fleuve à l'ouest ? Il fallait traverser une lande poussiéreuse, et Abatik se souvenait que Seln s'était achetée la veille un nouveau bustier. A exclure là aussi.

Restait la route du sud, qu'Abatik prit en sautillant.

 

Une heure plus tard, le Diablotin interrogeait l'aubergiste de Tranche-Collines. Coup de chance, Seln était passée par l'auberge l'avant-veille pour s'y reposer.

Elle était repartie au bout de cinq minutes en découvrant l'absence de chambre individuelle, de baignoire ainsi que l'obligation de payer ses repas.

Dix minutes supplémentaires suffirent au Diablotin pour apprendre d'un garde qu'un convoi qui passait par là avait bien voulu la prendre avec eux.

Le garde connaissait même la destination : Cabestan.

 

A ce moment de ses recherches, Abatik commençait à se faire une petite idée de la destination probable de la Succube. Il espérait juste se tromper…

 

 

En arrivant dans les Tarides, Abatik se souvint brusquement du chaos semé par Mezz lors de leur dernier passage.

La Croisée était quasiment encerclée par plusieurs manifestations concurrentes organisées, le Diablotin l'apprit vite, par des organisations syndicales rivales car issues de scissions.

Leur concurrence avait facilement pris la forme de batailles rangées, compliquées non seulement par leur nombre mais aussi par le fait que les dirigeants des communautés concernées, contestés par leur base, avaient embauché des mercenaires pour rétablir l'ordre.

 

Et au milieu de ce capharnaüm, la poignée de gardes Orcs assurant la sécurité de l'avant-poste de la Horde essayaient de maintenir un peu de calme à grands coups de massues…

 

Oh, j'oubliais. Il va de soi que tant les mercenaires que les gardes de la Horde étaient eux aussi "contaminés" par le syndicalisme militant provoqué par Mezz…

 

Normalement, Abatik n'aimait pas vraiment les Marcheurs du Vide. Leur arrivée auprès d'un Démoniste signifiait souvent la mise au rencard des faibles Diablotins. Mais il fallait reconnaître à Mezz un vrai talent pour semer le désordre.

 

Abatik réussit à esquiver les manifestants et se dirigea vers l'est, vers Cabestan, ses gobelins et ses bateaux vers les Royaumes de l'Est…

 

 

Loin de là, au cœur du gouffre de Ragefeu, Moustaches reprit ses esprits. Même s'il maîtrisait assez bien la technique, voir au-delà de son champ de vision nécessitait de grands efforts pour lui. Mais il était rassuré. Le Diablotin jouait la partie comme il l'avait prévu.

Puis le rat entreprit de grignoter les pieds d'un cadavre qui traînait par là.

 

 

***

 

 

Chapitre 33 : Lizaa

 

 

- Slt ! On két ensanble ? Moa sé Lizaa !

 

Vimayre hésita. Et sentit immédiatement que ça allait être dur… Déjà que le Sépulcre était rempli de ces foutus Morts-Vivants...

 

- Tu as rencontré un certain Llégion. Un Démoniste. Tu sais où il est allé ?

- ???!!!

- D'ac-cord... Toi connaître Llégion ? Moi chercher lui.

- Ui ! Y lé gren é chov é kon ! Mé y ma édé a fér dé ket ! é y ma doné dé PO ! Mé y lé plu den la guild ! Y lé parti ! lol !!!

- ... Je vois. Toi savoir où lui parti ?

- Y voulé alé a Ombrecroc ! lol !!!

- Tout seul ?

- Ge sé pa ! Y ma pa di ! lol !!!

- Où lui être quand lui quitter toi ?

- On nété a Fossoyeuse ! é y lé parti ! é y ma plu doné de PO ! lol !!!

 

Vimayre respira profondément en pinçant l'arête de son museau. La conversation avec cette… "créature"… commençait à lui donner mal à la tête.

 

- Bon. Toi savoir si lui parler avec quelqu'un ?

- Lol ! Je sé kil a vu 1 mago ! 1 elph de sen ! lol !!!

- Intéressant… Tu connais son nom ?

- ???!!!

- Bon sang… Toi savoir nom à lui ?

- Mé ui ! Y sapel Llégion ! Té 1 maran toi !!!

- Non… Le nom du mage. Du "mago".

- Lol ! Javé pa conpri ! Le mago y sapel Mercät. Lol !!!

- Et tu aurais des informations sur… Pardon. Toi savoir choses sur le mago ?

- Ui ! Y di dé blag ! Dé supair draul ! Lol !!!

- Toi savoir où lui être ?

- Ui ! Y fé 1 skeptakl à Lune d'Argent. Lol !!!

- Merci. Tu m'as beaucoup aidé.

- ???!!!

- Pfff… Toi aider moi beaucoup beaucoup. Moi dire merci toi.

- Lol ! Té 1 maran toi !!!

 

Vimayre soupira et quitta précipitamment la Morte-Vivante. Non seulement son mal de crâne était en train d'empirer, mais en plus ça commençait même à lui piquer les yeux…

 

 

***

 

 

Chapitre 34 : Quand Abatik rencontre Edualk

 

 

Abatik n'en revenait pas. Il dut se coller une claque pour vérifier que ce qu'il voyait n'était pas le fruit d'une hallucination.

 

Cabestan était d'ordinaire un petit village calme et peu peuplé. Les aventuriers de passage ne restaient que le temps de faire réparer leur équipement et de passer à la banque avant d'aller visiter les Cavernes des Lamentations.

 

Mais cette fois-ci, des centaines d'aventuriers de l'Alliance encombraient la zone. Un brouhaha considérable, entrecoupé de cris quand deux Guerriers se battaient en duel, rendait toute conversation absolument impossible à une lieue à la ronde.

Et surtout, les aventuriers avaient l'air de s'ennuyer considérablement…

 

Abatik, qui avait le sens de l'observation, nota aussi autre chose, mais il n'y accorda pas d'attention sur le coup. Mais cela fit néanmoins écho dans son esprit à une autre idée qu'il avait gardé en mémoire.

 

La situation ne gênait pas le Diablotin, qui en avait vu d'autres. Le problème, c'était comment retrouver la trace de Seln sans se faire piétiner...

 

Abatik en était encore à chercher comment se faufiler jusqu'à l'auberge quand son ouïe acérée surprit une conversation entre deux Paladins de l'Alliance.

 

- Franchement, il est temps que le Maître de l'Ordre fasse quelque chose. Ce type nous fait honte...

- Il ne fera rien. J'ai entendu dire qu'il y avait une vieille histoire entre lui et le grand-père du type...

- Tu parles du vieux sénile qui emmerde tout le monde à la Comté de l'Or ?

- Il n'y est plus. L'hospice de Hurlevent a fini par lui mettre la main dessus, malgré la protection du Maître.

- J'aimerais bien savoir comment ce vieux sénile tient notre Maître... J'ai entendu parler d'une histoire de bizutage...

- Vaut mieux pas savoir, crois-moi. Il parait que le dernier qui a évoqué cette histoire dans la cathédrale s'est retrouvé concierge à Ruisselune...

- Pas mal...

- ... avec interdiction d'approcher les Mortemines.

- Moche. Mais je maintiens que l'autre, avec son tigre feignasse et ses histoires de Draeneies, il nous fiche la honte !

- Surtout qu'il squatte le meilleur lit de l'auberge...

 

Abatik réfléchit. Edualk. Ainsi l'arrière petit-neveu de son Maître était lui aussi à Cabestan. Le Diablotin avait gardé de l'homme une image sympathique : un Paladin qui mène en bateau et torture psychologiquement un Démoniste de la Horde a forcément un bon fond !

Pardon, un "mauvais" fond…

Et surtout, Abatik pensait qu'il était sûrement moins bête qu'il n'en avait l'air...

 

Le Diablotin se dirigea donc vers l'auberge.

 

Les écuries lui confirmèrent la présence du Paladin.

Nonchalamment affalé dans une litière, un énorme tigre somnolait.

Une écuelle dans laquelle on aurait mis un cheval se trouvait à portée de patte, et débordait littéralement de viande.

 

La sérénité de la scène vola soudain en éclat quand parut Edualk.

 

- C'est bon ? T'es content ? T'as tout ce qui faut ?

- Mrrr...

- Tu me diras quand t'auras fini, hein ?

- Rrrr...

- J'aurais jamais cru ça de toi… Tricher aux dés… C'est nul !

- Hrrr hrrr hrrr…

- Je sais pas ce qui me retient de te faire cuire à la broche...

- Graou.

- Si, j'ai le niveau en cuisine ! En plus, t'es bien content quand je m'esquinte à te faire à manger !

- Maow !

- Si c'est dégueulasse, pourquoi t'en redemandes ?

- ...

- T'as raison, tais-toi, tu m'énerves... T'es qui toi ?

 

Abatik retourna subitement à la réalité. Malgré son camouflage furtif, le Paladin l'avait repéré.

 

- Euh... Je ne suis qu'un humble Diablotin qui a perdu son Maître, noble seigneur.

- Tu sais quoi ? Ca marcherait mieux sans le noeud rose.

 

Abatik hésita et, lentement, ramena sa main sur sa tête... où trônait un magnifique noeud rose. Il se souvint brusquement qu'il avait le même à Baie du Butin, quand il avait rencontré Edualk pour le plumer.

Moins bête qu'il n'en a l'air…

 

- Alors, comment va le sac d'os ? Toujours pas Maître du monde ? Je pense pas, sinon j'en aurai entendu parler, non ?

 

Abatik hésita encore. C'était un Paladin de l'Alliance, donc techniquement doublement un ennemi. Mais en même temps, c'était un tordu et Abatik avait besoin d'aide.

Surtout que la petite idée qu'il avait en tête lui faisait des appels du pied insistants, et que si cela se vérifiait, Edualk serait utile.

Le Diablotin choisit donc, après avoir pris une profonde respiration, d'être franc avec lui.


Après tout, c'était quand même la famille, non ?

 

 

Loin de là, à Ragefeu, Moustaches dressa les oreilles et fronça le museau. Ca y était. La rencontre avait eu lieu, comme prévu. Ne restait plus qu'à attendre…

Puis le rat s'assit pour attendre le Démoniste qui venait encore une fois de mourir.

 

 

***

 

 

Chapitre 35 : Mercät

 

 

- … et là la petite souris dit : oui mais moi j'ai été malade.

 

Toute l'auberge de Lune d'Argent éclata de rire tandis que Mercät faisait le tour de la scène en battant des ailes comme un poulet.

 

Vimayre secoua la tête. Un spectacle comique par un Elfe de Sang… Il devait sûrement exister pire supplice dans l'univers, mais de peu.

Vimayre attendit donc dehors que le spectacle se termine, puis rentra à nouveau lorsque le public commença à sortir.

 

- C'est vous Mercät ?

- Le seul et l'unique ! Vous voulez un autographe ? C'est pour qui… dam ? Vous avez compris ? Quidam ? Je suis génial !

- En fait, je suis un Contrôleur Principal…

- … sambleu ! Palsambleu ! Vous avez compris ?

- Et je suis ici…

- … phon ! Siphon ! Vous avez compris ?

 

Vimayre sentit son mal de crâne revenir à toutes jambes.

 

- Soit vous arrêtez de suite, soit je…

- … de main ! Jeu de main ! Vous avez compris ?

- … serais dans l'obligation de me penchez sur vos déclarations. Car vos spectacles sont déclarés, n'est-ce pas ?

 

Mercät faillit répondre "-tisserie", ce qui aurait fait un super jeu de mots, mais quelque chose lui souffla que ce n'était peut-être pas le moment.

 

- Euh… Vous voulez quoi ?

- Llégion. Un Démoniste Mort-Vivant. Vous l'avez accompagné à Ombrecroc.

- … quignolesque. Croquignolesque ! Vous avez comp… Hum… Oui, je le connais. Une prestance royale, un front d'intellectuel, et l'air très intelligent. On s'est quitté après qu'il m'ait aidé à tuer un sale type sans humour.

- Et il est parti où ?

- … rs en peluch… Hum… J'ai entendu parler d'un nouveau démon. Fossoyeuse sûrement.

 

Vimayre soupira. Il y avait peu de choses plus détestables que les Morts-Vivants, et malheureusement les Elfes de Sang en faisaient partie.

 

 

***

 

 

Chapitre 36 : Le charme de la vie à deux

 

 

- On a un souci, Monseigneur. Un gros.

- Tu vas me raconter ça autour d'un verre, petit. Et ton nom, c'est quoi ?

- Abatik, Monseigneur. Et je ne bois pas.

- Laisse tomber le protocole, Aba. T'as pas idée à quel point ces trucs-là me gonflent...

- D'accord, m'sieur. Si vous permettez, vous êtes assez... original pour un Paladin. Je suis un démon, vous savez.

- Tu dis ça parce que tu connais pas la famille. Je peux t'assurer que ton Maître ne fait pas tâche. Au contraire. Son frère était lui aussi bien atteint, mais dans un genre... différent.

- Son frère, m'sieur ? Mon Maître a un frère ?

- "Avait". Il doit être mort depuis le temps. Quant à son histoire... Papy me l'a raconté. J'te raconterai un jour. Comme ça, t'auras un peu moins honte de ton Maître. Bon, sinon, tu cherches qui au juste ?

 

Abatik tiqua. Il n'avait pas parlé de chercher quelqu'un. Comment avait-il deviné ?

Oui, vraiment moins bête.

 

- Nous avons, comment dire… "égaré" notre Succube, m'sieur. Elle s'appelle Selneri, et il semble qu'elle soit venue ici il y a deux jours.

- Une Succube ? Ce vieux sac d'os s'est dégoté une Succube ? Ben y s'emmerde pas ! Finalement, il se débrouille pas trop mal, apparemment…

- C'est pas aussi simple, m'sieur. Ca l'est jamais avec mon Maître. Seln est du genre "gentille". Et aussi capricieuse et boudeuse. Une sorte de gamine, m'sieur. D'où sa fugue.

- Gentille ? Une gamine ? Pas du genre rural, je suppose ?

- C'est rien de le dire, m'sieur.

- Cherche plus, je sais où elle est. Mais ça va pas être simple. Pas du tout même.

- Ca n'aurait pas un rapport avec la présence de tous ces aventuriers ici, m'sieur ? Et le fait qu'il n'y ait aucune fille ?

- T'es un malin, Aba. Oui, y'a un lien. Un truc s'est produit à Hurlevent.

 

Le silence se fit brusquement dans l'auberge pourtant bondée. Quelques aventuriers couturés de cicatrices se mirent à pleurer. Devant le comptoir, un gigantesque Prêtre Draenei portant la marque de l'Aldor se mit à trembler et à se mordre le poing, tandis qu'un de ses amis essayait de le calmer.

Tous les regards étaient braqués sur Edualk et le Diablotin. Un Elfe, nonchalamment assis à la table voisine, commença à parler.

 

- C'est arrivé soudainement, petit. Aucun avertissement. Mais "elles" savaient. Et quand la chose s'est produite, "elles" étaient prêtes.

- "Elles", Monseigneur ?

- Oui, petit. Nos compagnes. Nos sœurs. Nous avons à peine eu le temps de nous enfuir dans le seul lieu où on ne risquait rien, à Cabestan.

- Mais… de quoi parlez-vous, Monseigneur ?

- Un truc de filles, Aba. Le genre qui truc à faire fuir tous les mâles.

 

L'Elfe interrompit Edualk.

 

- Tu peux parler, Edualk. Tout le monde sait que t'as jamais été foutu de te dégoter une fille. Alors les avis d'un célibataire… Tu connais rien à ça. A se demander ce que tu fous là, d'ailleurs.

- Vas-y, dis-le plus fort ! J'ai une réputation à tenir, moi !

 

L'Elfe regarda Edualk les yeux écarquillés, puis éclata de rire en même temps que toute la salle.

Mais Abatik plomba à nouveau l'ambiance.

 

- Euh… On parle de quoi exactement, Monseigneur ?

 

L'Elfe plissa les yeux et soupira. Les aventuriers autour d'eux se mirent à regarder leurs pieds d'un air gêné. On entendit un gloussement hystérique venant du fond de la salle, tandis qu'un Gnome se remettait à pleurer silencieusement.

 

- Je parle de… *profonde respiration* des…

- Non ! Ne prononce pas le mot ! cria une voix dans la foule

- … Des soldes, petit.

 

Un silence de mort accueillit les paroles de l'Elfe. Celui-ci voulut se servir un verre de vin, mais sa main tremblait tellement qu'il en renversa la moitié à côté.

Abatik regarda les hommes qui l'entouraient. Uniquement des vétérans, tous lourdement équipés avec le meilleur matériel glané sur les champs de bataille d'Azeroth ou en Outreterre.

Tous tremblant comme des feuilles.

Le Diablotin regarda Edualk, qui hocha la tête avec sérieux.

 

- Attendez, les gars… Messeigneurs. Vous vous êtes enfuis de Hurlevent parce que ce sont les soldes ?! Vous ?! La fine fleur de l'élite de l'Alliance ?!

 

L'Elfe reposa brutalement son verre sur la table, en en cassant le pied.

 

- Tu n'y connais rien, petit ! Tu n'as jamais dû suivre ta copine les bras chargés de colis ! Tu n'as jamais dû l'attendre à l'entrée des boutiques pendant qu'elle dépensait ton or durement gagné !

- Moi, j'ai pas pu acheter ma monture à cause de ça, dit une voix.

- Moi, j'ai même dû revendre mon bouclier pour lui payer une jupe, dit un autre.

- Moi, j'ai même dû essayer ses robes pour faire des retouches, et elle ne m'en a même pas laissé une seule, dit un troisième.

 

Un long silence accueillit cette dernière remarque. Le Guerrier qui l'avait prononcée, un Nain à la longue barbe tressée, rougit sous son heaume de plaques.

 

- Ben quoi, on fait tout les deux la même taille. En plus, elle m'allait super bien, cette robe. Je veux dire, c'est moi qui l'ai payé et je peux même pas la porter… Pourquoi vous me regardez comme ça, les gars ?

 

L'Elfe secoua la tête d'un air accablé. Mais discrètement, quelques Guerriers se rapprochèrent du Nain et commencèrent à parler avec lui d'un air intéressé.

 

- Ne nous dis pas que nous sommes des lâches, petit. Tu ne sais pas. Tu ne peux pas savoir.

- C'est pour ça que nous sommes tous ici, intervint Edualk. Cabestan est tellement pourri qu'elles ne viendront jamais nous chercher ici…

- Pas toi ! cria quelqu'un dans la foule.

- Ta gueule. Ta Succube y est sûrement. Elle a probablement pris le bateau vers Baie du Butin, puis de là est remontée vers Hurlevent.

- Donc je dois y aller, m'sieur.

- Tu vas te faire massacrer, Aba. Les gardes sont très nerveux depuis le dernier raid de Hordeux. Surtout que ce sont les filles qui les ont massacrés…

- J'ai pas le choix, m'sieur. Mon Maître va piquer sa crise si je reviens les mains vides.

- Et je suppose que tu vas me demander un coup de main ?

- Ben oui, m'sieur. C'est pour la famille.

 

Edualk sourit avant de vider sa chope de bière.

 

 

Près du cimetière de Durotar, attendant le Démoniste, Moustaches sourit. Il était assez fier de ce coup-là, et les suites risquaient d'être amusantes.

Puis le rat se gratta l'oreille.

 

 

***

Publié le 05/02/2010 - Pas de modifications
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