Edualk
Race: Humain
Classe: Paladin
Niveau: 80
Serveur: Les Clairvoyants
Jeu: World of Warcraft
Etat: Actif
Infos
39 articles
3 commentaires
2 images
Du même auteur
Rejoignez-nous !
Publiez vous aussi les exploits de vos personnages en ouvrant un compte sur rp.azrelia.fr !
Site hors-charte
Choisissez une catégorie
11 messages - Cliquez sur un titre pour afficher la page dans une autre fenêtre
*

Bonjour à tous !

Après mes quelques textes épars ;
Après les inénarrables aventures de Llégion le Maléfique (enfin terminées - temporairement ! - à lire sur le site en signature) ;
Après la vie d'Edualk en 15 épisodes marquants ;

Voici enfin un nouveau récit : le LIVRE DE SANG.


Contrairement à mes habitudes, je commencerais par un prologue explicatif de l'intrigue, des enjeux et des personnages, histoire que tout le monde réussisse à suivre ! (oui, je crains d'avoir monté une intrigue assez complexe et d'avoir trop de personnages... On verra bien...)

De plus, je vous renvoie à plusieurs récits ayant précédé celui-ci, et posant les personnages, tous sur le même site :
- L'histoire d'Edualk (la fin introduit en partie ce récit)
- "Le plus parfait des Paladins", l'histoire de son aïeul chevalier et de sa chute (parce que ce personnage réapparait)
- La dernière quête du Nain, où apparait l'Esprit de Sang, protagoniste de ce récit


Ce récit se veut sombre voire glauque. Il raconte la réapparition d'un esprit maléfique - l'Esprit de Sang - et de sa traque par plusieurs personnages. Mais je vais mélanger sérieux et humour selon les personnages, en espérant que ça fonctionne correctement.

Précisons aussi que ce récit commence juste avant la réapparition du Fléau et du Roi-Liche, et de l'assaut des deux factions contre le Norfendre.


***


Toute histoire a un commencement.

Celle-ci commence il y a une éternité de cela, très loin d'Azeroth, en un monde que l'on nommait Draenor. Il y avait en ce monde une abomination. On le nommait l'Esprit de Sang.
De temps en temps, une bête, toujours une femelle, devenait folle, possédée par cet esprit. Elle se mettait à tuer, sans aucune limite, sans distinction, sans raison. Ou plutôt si, pour une seule et unique raison : le sang. Sa soif était sans limite, sans frein, si exigeante que les yeux de la bête possédée luisaient d'un lueur rougeâtre... noyés de sang.

L'Esprit de Sang était connu et craint des principaux peuples de Draenor. Quand il prenait possession d'une bête, ils lançaient la chasse immédiatement, pour l'abattre, pour mettre fin aux atrocités, aux massacres, avant qu'ils n'atteignent un point de non-retour.
La chasse interrompait même la guerre.
Un cycle sans fin.


...


Le temps passe, et nous aussi - il y a près d'un siècle, en Azeroth. L'histoire de deux frères, un chevalier et un sorcier.
Ces deux frères étaient les meilleurs dans leur domaine. Et leur excellence devait sceller le destin d'Azeroth. C'est du moins ce que l'on aurait pu croire. Car le chevalier à la morale si élevée connut l'amour, la perte... et la trahison. Il se lança dans une longue quête qui se termina par la destruction de tout ce qu'il était, de tous ses principes. De son existence en tant qu'être humain.
Il chuta, et disparut, comme s'il n'avait jamais existé. Il ne laissa qu'une histoire tragique, celle du Paladin, de sa belle et du dragon.
Une histoire... et un fils. Sa lignée ne s'éteignit pas.

Et son frère le sorcier ? Lui aussi disparut.

Ce fut la fin de leur histoire... ou du moins pouvait-on le croire.


...


Puis il y eut Gul'dan et son pacte maudit. En Draenor, les Orcs sombrèrent dans la sauvagerie, et exterminèrent l'autre peuple de ce monde, les Draeneis.
Et quand l'Esprit de Sang réapparu, comme il le faisait régulièrement, personne cette fois-ci ne s'opposa à lui. Il se gorgea de sang, plus qu'il n'en avait jamais eu. Et apprit, car on lui en laissa le temps.
Il y eut néanmoins des héros qui, en ce monde sombrant dans le chaos, n'avaient pas oublié. Encore une fois, l'Esprit fut abattu... et prit possession d'un autre porteur. Plus efficace, plus apte : une Orque.
Et la course sanglante recommença, pire que ce que ce monde agonisant avait déjà pu connaître.

Il y eut alors une ultime alliance entre les bourreaux et leurs victimes, entre des Orcs et des Draeneis qui n'avaient pas oublié - dont un Orc, un péon devenu grunt du fait de la guerre, que ses soldats surnommèrent plus tard e Cagneux.
Ils traquèrent l'Esprit, devenu plus fort, plus assoiffé, plus mortel, en espérant cette fois-ci pouvoir le détruire définitivement.
La traque réussit. L'Orque fut tuée, et l'Esprit de Sang emprisonné et banni.


Cela devait mettre fin au sang, définitivement. Ce ne fut pas le cas.
Car au moment même où l'Esprit fut banni de Draenor, la réalité fut déchirée par un acte qui devait sceller le destin d'un autre monde : l'ouverture d'une faille entre Draenor et Azeroth, due à la trahison de Medivh, le Gardien de Tirisfal.
Avant même que la Porte ne fut complétement ouverte et ne livre passage aux Orcs, l'Esprit l'avait traversé et était passé en Azeroth.

Ce monde vivait dans une fausse sécurité, attendant sans le savoir encore sa dévastation. L'arrivée de l'Esprit de Sang, dont nul ne pouvait imaginer les atrocités, en fut un signe avant-coureur.
Ce fut une Humaine, une simple fille de ferme, qui reçu l'Esprit et se transforma en monstre assoiffé de sang, dévastant, massacrant, tuant sans limites, à tel point que son nom, la Sanglante, devint synonyme de terreur.
L'Esprit découvrait un monde qui ne le connaissait pas, et en jouit sans réserves.

Un petit groupe d'aventuriers se chargea de le combattre et de l'éliminer. Un guerrier Nain du nom de Gloïn Marteau d'Acier, qui cherchait à venger la mort de son seul fils. Un érudit Gnome, Grangarçon. Et un jeune voyou que Gloïn espérait remettre dans le droit chemin, du nom d'Arsène.
Arsène... un voyou, certes, mais il était le petit-fils d'un chevalier oublié de tous, sauf d'un de ses rares amis, Gloïn Marteau d'Acier. Un chevalier... le chevalier, au destin brisé.

La femme fut tuée - et l'Esprit, encore une fois, s'échappa.

Mais il continuait d'apprendre, de se développer, de rechercher de nouvelles façons d'étancher sa soif sans limites. Pendant plusieurs années, il se cacha, observant, le temps de trouver un nouveau porteur.


...


Les Orcs passèrent la Porte Noire, et Azeroth sombra dans le chaos jusqu'à la destruction de Hurlevent et la fin de la Première Guerre.
Et l'Esprit, toujours, cherchait celle apte à l'accueillir - il cherchait, et trouva. Une Elfe, jeune mais ambitieuse. Folle, aussi. Leur soif se rejoignirent, et l'Esprit la posséda.

Ce fut une nouvelle course sanglante dans un monde en suspens. La Sanglante était réapparue et écrivait une histoire de sang et d'horreurs, dans le seul but d'étancher sa soif sans fin.
Les Orcs avaient oublié.
Les peuples d'Azeroth n'avaient pas encore compris.
Mais il avait quelqu'un pour se souvenir. Un vieil Orc surnommé le Cagneux, qui ne pouvait s'en charger. Et un vieux Nain dont il était devenu l'ami, du nom de Gloïn Marteau d'Acier...

Le vieux Nain reprit la route alors que l'Alliance et la Horde se préparait à livrer leur ultime affrontement. Seul, sans illusion. Prêt à mourir.
C'est au cours de cette dernière quête qu'il rencontra un homme mystérieux et encapuchonné, solitaire et muet. Un homme sans âme, d'où émanait un vide effroyable, tenu par une douleur si terrible que nul n'aurait dû pouvoir la supporter.
Un homme qui, il le comprit vite, cherchait la même chose que lui.

Gloïn et son étrange compagnon trouvèrent la Sanglante, quelque part en Lordaeron.
Le vieux Nain n'était pas de taille. La Sanglante pouvait le briser uniquement par sa soif illimitée. Mais elle ne put briser l'homme mystérieux.

Celui-ci affronta la Sanglante... et la soumit à sa volonté.
Il l'emprisonna, prenant en lui sa soif, sa folie sans limites.

Et Gloïn Marteau d'Acier, les larmes dans les yeux, comprit que cet homme mystérieux était le chevalier au destin brisé, disparut tel un ancien rêve, mais qui était revenu, pour lui. Pour son ami.
Et pour accomplir une ultime fois son devoir envers ce monde.

Le chevalier disparut à nouveau - disparu dans une obscurité sans fin, en un lieu qui n'existe pas.
Douleur et vide.
Et un Esprit assoiffé tenu prisonnier faute de ne pouvoir le détruire - jusqu'à la fin des temps...


...


Le temps passa. Azeroth continua de vivre, et les héros de se couvrir de gloire et de mourir.

La guerre entre l'Alliance et la Horde prit fin - d'une certaine façon.
Un Prince promis à de grandes choses choisit la voie de la mort et de la destruction. Arthas, nouveau Roi-Liche.
Maître du Fléau.
Ennemi de toute vie.

Il détruisit son propre royaume, et disparut, pour un temps.


...


Le temps passa, encore.

Gloïn Marteau d'Acier avait cessé de s'intéresser au monde.
Arsène n'avait jamais cessé d'être un voyou. Son propre fils, du nom d'Edualk, devint Paladin.
Le Cagneux, perclus de rhumatismes mais bien content d'avoir survécu, coulait des jours paisibles en Durotar.

Mais ce n'était qu'une pause, qu'une respiration.

Pour des raisons que nul ne songea à lui demander, la reine banshee des Réprouvés de Fossoyeuse, la sombre Sylvanas, fit revenir à la non-vie un sorcier oublié portant le nom de Llégion.
Un sorcier qui, autrefois, fut le meilleur et devait affronter son propre frère... un chevalier.
L'histoire bredouille, en bien ou en mal.

Car le Prince traître à son peuple est revenu. Il se prépare à lancer ses forces contre Azeroth, pour détruire ce monde, et mettre fin à toute vie. Pour cela, Arthas a levé des serviteurs dignes du mal qu'il veut commettre : les Chevaliers de la Mort.
Il a pour cela dû user de moyens si terribles que la réalité, encore une fois, en a été ébranlée.
Encore une fois...


Obscurité sans fin. Un lieu qui n'existe pas.
Un esprit assoiffé, torturé, soumis mais non maté cherche depuis une éternité un moyen de s'échapper.
Cherche... et trouve.

Alors que le nouveau Roi-Liche provoque une nouvelle guerre, l'Esprit de Sang s'est échappée de sa prison. Il est assoiffé, fou de colère et de rage, rempli de toute l'expérience de siècles de massacres.
Il a appris de ses hôtes, appris à les choisir, à se cacher si nécessaire, à choisir ses proies.
L'Esprit de Sang est revenu. Et il a soif. Une soif comme il n'en a jamais connu. Comme Azeroth n'en a jamais connu.

Il a repris sa chasse.
Chasseur... et bientôt chassé.


En ce qui reste de l'ancienne Lordaeron, une jeune Réprouvée amnésique surnommée Mainnoire est convoquée par la Dame Noire.
Venant d'Outreterre, un Paladin du nom d'Edualk traîne son ennui dans les Maleterres.
En Durotar, un vieil Orc que ses soldats surnommaient le Cagneux marche vers Orgrimmar, convoqué par le Chef de Guerre en personne.
A Hurlevent, une crapule de bas étage du nom d'Arsène squatte une taverne.


Et en un lieu qui n'existe pas, au coeur d'une obscurité sans fin... "IL" ouvre les yeux.
Il a échoué. Son prisonnier s'est échappé.
Une tâche à accomplir.
Réparer son erreur.
Définitivement.


Une bête assoiffée.
Des chasseurs.
Et un souvenir du passé, pour faire en sorte que la chasse réussisse.


Nous sommes en Azeroth.
Vingt-sept années après l'ouverture de la Porte Noire et l'invasion originelle d'Azeroth par les Orcs.
Sept années après la trahison d'Arthas et la chute de Lordaeron.
Une sombre obscurité va bientôt se répandre... et un froid glacial, venu du Norfendre...


Les première pages du LIVRE DE SANG vont pouvoir s'écrire...


Poster un commentaire - Commentaires (0)
Créé le 02/10/2012 à 12:33:59 - Pas de modification


Prison


Mon serment...

L'enfant est légère dans mes bras. Mais je sens le poids de l'esprit qui est en elle. Je sens sa soif, absolue, sans limite, sans fin.
Cette soif obscène du sang...
SANG !
L'Esprit me frappe avec toute sa force et toute sa volonté pour me briser.
SANG !
Efforts inutiles. Ce qui est brisé ne peut l'être à nouveau. On ne peut détruire ce qui n'existe plus.
SANG !
Tu perds ton temps.

Je cherche. Un lieu, solitaire, oublié et perdu. Pour accomplir mon serment. Une toute dernière fois.
Une prison. Pour cet Esprit obscène que rien ne peut détruire.
Et pour accueillir une âme brisée... Mon âme... Jusqu'à la fin des temps...

Je cherche...
Oui.
Ce lieu conviendra.

Il y a l'obscurité sans fin.
Dans un lieu qui n'existe pas.

La prison parfaite.


...


Je rêve que je m'endors.
Je rêve...
que...
je...
dors...
...

Ma belle... Pardonne-moi...


Poster un commentaire - Commentaires (0)
Créé le 02/10/2012 à 12:35:40 - Pas de modification



Chapitre 1 : Une folie pure

 
La nuit était claire sur Lune d'Argent, et la ville tranquille. Dans une ruelle, de la lumière et de la musique sortaient d'une auberge discrète. Trois Elfes portant la livrée des Gardes de la cité s'arrêtèrent devant la porte. Leur officier fit un geste vers la porte.
 
- Normalement, il est ici. Vous surveillez les entrées et vous me laissez faire.
 
Les deux gardes approuvèrent de la tête et suivirent leur chef à l'intérieur.
 
 
L'auberge était remplie d'Elfes discutant et s'amusant autour d'un verre. Aucun autre membre de la Horde - le lieu ne leur faisait pas bon accueil. 
L'officier passa en revue les tables, puis sourit en voyant ce qu'il cherchait. D'un bref hochement de tête, il montra l'entrée des cuisines à l'un de ses hommes qui s'y rendit pour surveiller la sortie, tandis que le second restait à l'entrée, la main sur la poignée de son épée. Puis l'officier marcha à travers la petite foule jusqu'à la table qu'il avait repérée.
 
Un Elfe relativement âgé était assis devant un verre de vin, une carafe bien entamée devant lui. Il semblait d'humeur joyeuse, et ne remarqua l'officier que quand celui-ci s'arrêta devant lui.
 
- Vous êtes Lot'latham ?
 
L'Elfe leva la tête d'un air ennuyé, et se redressa en voyant à qui il avait affaire.
 
- Oh, salutations Capitaine ! Vous venez des Terres Fantômes, à voir votre uniforme. Vous êtes bien loin de votre garnison, dites-moi.
- Nous avons à parler.
- Bien sûr, je vous en prie, asseyez-vous ! Vous buvez quelque chose ?
- Pas en service.
- Je vois. Ne vous vexez pas si je reste au vin. Et que puis-je pour vous ?
- Vous connaissez un certain Tel'sallas ?

Lot'latham hocha la tête.

- Oui, c'est un de mes plus vieux amis. Quelque chose lui est arrivé ?
- Je viens vous parler de celle qui se fait appeler Ichorine.

Lot'latham se renfrogna.

- Je m'en serais douté... Ichorine... La fille aînée de Tel'sallas. Elle a causé du soucis, autrefois, mais cette période est finie.
- Que savez-vous sur elle ?
- Et bien... C'est une jeune femme maintenant, une Chevalière de Sang, partie sur les routes pour défendre notre place en Azeroth.
- Vous avez parlé de "soucis"...
- Oui, bien sûr, vous avez dû en entendre parler... A la fin de la guerre, Tel'sallas est retourné auprès de son épouse et de sa fille, Driel - c'est son vrai nom, et pas ce nom de guerre qu'elle a choisi depuis, Ichorine. Quelle magnifique enfant, aux cheveux si blonds qu'ils en étaient presque blancs.
- Si magnifique que cela ?
- Et bien... Malheureusement, son comportement s'était vite révélé, comment dire... inquiétant.

L'officier hocha la tête.

- Je l'ai entendu dire, mais sans plus de détails.
- Il est vrai que les enfants inquiètent souvent leurs parents. Surtout en ces temps difficiles pour notre peuple. Mais pour Driel, c'était différent. Oui, différent...

Le regard de Lot'latham se perdit dans les souvenirs.

- Derrière sa beauté charmante, une enfant égoïste, extrêmement fière et méprisante. Extrêmement sensible à ce besoin qui nous hante tous. En manque, elle passait par des crises terribles, et particulièrement humiliantes pour sa fierté si élevée. Elle a ainsi montré très tôt un comportement instable : méprisante envers les autres, menteuse, gratuitement cruelle.
Je me souviens de la fois où elle m'a montré le chat que ses parents lui avaient offert pour son anniversaire... Elle lui avait arraché la peau et crevé les yeux... Et la pauvre bête vivait encore...

L'officier leva un sourcil.

- Elle était donc bien folle ?
- Folle ? Oui... On pourrait dire cela... Instable tout du moins, dangereuse pour les autres comme pour elle-même.
Lorsqu'elle est devenue adolescente, Tel'sallas m'a demandé de l'aider. Son état s'était aggravé avec l'âge, il fallait agir sous peine de la perdre. Nous avons alors fait jouer de notre influence pour la faire entrer dans la voie des Chevaliers de Sang. Cela nous sembla le mieux pour recadrer cette jeune fille et soigner son esprit malade : la discipline de l'enseignement, la rigueur nécessaire pour maîtriser l'usage de la Lumière. Elle suivit cette formation exigeante sans éclat mais aussi sans difficultés, finalement. Ses parents l'envoyèrent ensuite à l'Ile de Haut-Soleil, pour méditer sur son engagement et se préparer à son service.
Tel'sallas me demanda d'aller la chercher, une fois sa retraite terminée. Elle revint à Lune-d'Argent avec moi, manifestement apaisée. Elle n'y resta pas d'ailleurs, et repartit le jour même pour courir les routes, et accomplir son serment de Chevalier.
Depuis, elle voyage dans ce vaste monde, apportant aide et réconforts aux siens, à ce que j'ai entendu dire.

Lot'latham se tut, regardant son verre sans le voir. L'officier se pencha vers lui, la mine sévère.

- Sauf que tout ceci est faux, et vous le savez.

L'Elfe eut un sursaut.

- Comment ? Vous ne me croyez pas ?
- Ce n'est pas ce que j'ai entendu.
- Et pourtant, je peux vous assurer...

Lot'latham bredouilla sous le regard sévère de l'officier, puis commença à sangloter.

- Miséricorde... Si seulement... Si seulement cela était vrai... Oui... Tout serait si simple...
- Dites-moi la vérité.
- Vous avez raison. Je vous ai menti. Comme j'ai menti à ses parents, à mon vieil ami et à son épouse. Comme je me mens à moi-même, en essayant d'oublier ce que j'ai vu...
- Qu'avez-vous vu ?
- Je suis sûr que vous savez... J'ai entendu des choses. Des rumeurs. Les mêmes qui vous ont fait venir à moi, probablement. Alors j'ai enquêté. J'ai suivi Driel devenue Ichorine, pour me faire ma propre opinion, pour voir de mes yeux.
- Le massacre de la bande des Egorgeurs.
- Vous savez cela ? Oui, c'est bien ça. Bien que l'affaire fut étouffée, je pense que c'est elle qui a assassiné et mutilé les cinq crapules retrouvées dans une ruelle il y a quelques années, alors qu'elle suivait sa formation de Chevalier. Des corps saignés à blanc, dont on avait arraché les yeux... Yeux que l'on a jamais retrouvés...
Ce massacre portait la marque d'Ichorine. Et son maître lui-même avait peur devant elle. Vous imaginez ? L'un des plus expérimentés parmi les Chevaliers de Sang de Lune-d'Argent, trembler devant une simple jeune fille ?
Son envoi sur l'Ile de Haut Soleil visait à la tenir éloignée de Lune-d'Argent, dans une ultime tentative de la soigner.

Lot'latham avait cessé de pleurer, mais son regard était hagard.

- J'ai vu son visage avant qu'elle ne parte, et la flamme qui brûlait au fond de ses yeux. J'ai vu mon vieil ami, qui jamais n'avait reculé devant les horreurs du Fléau, qui jamais n'avait tremblé devant quiconque, baisser les yeux devant sa fille. J'ai vu son épouse pleurer, désespérée...
Les yeux d'Ichorine... La flamme ardente qui y brûlait n'était pas celle de la foi et du courage. C'était... autre chose, de beaucoup, beaucoup plus inquiétant...
- Et après sa formation...
- Il est vrai qu'Ichorine avait l'air apaisée quand j'ai été la chercher à la fin de sa retraite. La flamme avait disparu de ses yeux. Elle semblait, comment dire... Cela avait l'apparence de la sérénité, mais je suis maintenant âgé, et j'ose dire que je sais lire derrière les apparences... Son attitude n'étais pas celle de la sérénité. La fierté était toujours là, mais s'était transformé en orgueil. La moue méprisante quand elle regardait les autres, quel que soit leur rang, la trahissait. Comment imaginer, alors, que ses autres aspects de sa personnalité aient disparu ? Et puis, le chevalier qui me l'a remise semblait soulagé de ce départ...
- Jesthenis Haurtesoleil, c'est cela ?
- Oui. Il m'a parlé ensuite, quand je suis revenu enquêter. Son séjour sur l'Ile fut effectivement calme. Mais dans le même temps, de très nombreuses bêtes vivant sur place furent retrouvées mortes. Saignées à blanc. Certaines avaient même les yeux arrachés...

L'officier secoua la tête lentement.

- Ichorine est folle à lier. Et dangereuse. Sa formation n'y a rien changé.
- Oui, vous devinez bien. Je sais maintenant qu'Ichorine a utilisé son séjour pour apprendre et maîtriser ses besoins et ses limites. Et elle a trouvé un substitut au besoin de magie, un substitut abominable : le sang.

L'officier eut un haut-le-coeur.

- Le sang ?
- Vous êtes choqué ? Vous ne saviez pas ? Je peux vous assurer que c'est vrai. Je l'ai suivi durant ses pérégrinations, et je l'ai vu massacrer toutes les créatures croisant sa route et boire leur sang... Je l'ai vu croquer leurs yeux... Je l'ai vu rire aux éclats en tuant, ronronner de plaisir alors que sa victime agonisait...
Oui, Capitaine. Ichorine a définitivement sombré dans la démence. Une démence meurtrière et sanglante que rien ne peut plus empêcher. Certes, elle sait faire illusion. Mais son mépris envers les autres êtres vivants est absolu. Il n'y a que quand elle combat, que quand elle tue, qu'elle revit, et que la flamme apparait dans ses yeux...

L'officier hocha la tête, puis se leva.

- C'est tout ce que je voulais savoir.
- Pourquoi vouliez-vous savoir ? A-t-elle... ?
- Une famille a été massacrée il y a trois jours de cela, sur la route de Tranquillien. Cela correspond à ce que vous m'avez raconté. Je vais arrêtez cette démente.

Lot'latham resta bouche bée, puis éclata d'un rire sans joie.

- Il faudrait déjà la trouver ! Et l'arrêter ? Mais comment ? En l'enfermant ? Cela ne règlerait rien. La tuer ? Mais en êtes-vous seulement capable ? Et croyez-vous... en avoir le droit ?
- Stupide. Le Régent ne tolère pas...

Lot'latham sourit.

- Vous êtes bien naïf... Croyez-vous vraiment que quoi que ce soit puisse se produire dans cette ville sans que nos dirigeants ne le sachent ? Le Régent est au courant. Il a même rencontré "par hasard" Ichorine à son retour. Il s'est contenté de sourire et de lui souhaiter bonne route...

L'officier resta silencieux, debout devant l'Elfe. Lot'latham soupira.

- Cela laisse songeur, n'est-ce pas ? Mais qui peut dire les plans de ceux qui nous gouvernent ? Qui peut dire l'utilité que peut avoir pour eux cette jeune fille ? Peut-être du profit pour notre peuple pourra-t-il ressortir de toute cette affaire... Pour ma part, Ichorine est perdue, et ses parents continueront à souffrir jusqu'à la fin de leurs jours...
Alors Capitaine, je vais me permettre un conseil : oubliez-la. Fuyez-la, même, ou Ichorine sera votre perte.
Il y a une seule chose que nous pouvons espérer, une seule chose que j'espère quand je suis seul, la nuit, avec mes cauchemars. Et que je crains en même temps : qu'elle croise la route d'un combattant de l'Alliance. Et qu'il la tue. Rapidement et sans hésitation.

C'est la meilleure chose qui puisse encore lui arriver... et à nous aussi...


***


Chapitre 2 : Massacre


L'officier resta un moment à regarder l'Elfe pleurer devant son verre. Puis il secoua la tête de dépit et fit signe à ses hommes de le suivre hors de la taverne.

- Alors, mon Capitaine ? Il a parlé ?
- Non. Il cherche encore à la protéger. Et je suis persuadé qu'il ne sait pas où elle est.
- Alors, que faisons-nous ?

Le Capitaine leva les yeux vers le ciel étoilé.

- Je vais prévenir nos garnisons, et faire passer le message auprès de nos alliés. Avec de la chance, elle recommencera et se fera prendre.
[i]- Jolis petits animaux, si mignons, si doux...[/i]

Les trois Elfes se retournèrent d'un bloc, la main sur les poignées de leurs armes. La voix, douce et ironique, était sortie d'un recoin sombre derrière eux.
Une jeune Elfe en sortit pour se placer en pleine lumière. Elle portait une cotte de mailles légère ne couvrant que sa poitrine et laissant le ventre nu. Celui-ci était couturé de cicatrices régulières. L'officier remarqua que chaque partie de sa peau nue portait de telles cicatrices - sauf son visage. Ses ongles étaient si longs qu'on croyait des griffes. Et elle avait les cheveux d'un blond si clair qu'ils en paraissaient presque blancs. Son visage affichait un mépris absolu, et un sourire amusé flottait sur ses lèvres minces.

L'officier tira son épée de son fourreau.

- Ichorine ! Saloperie de bâtarde !
- Jolis petites créatures, gorgées de sang sucré...

Malgré les trois Elfes menaçants, Ichorine ne semblait pas du tout inquiète. L'officier grogna.

- Excellent ! On va régler ça ici et maintenant. Tuez-la !

Les deux gardes se jetèrent sur l'Elfe. Celle-ci se contenta d'esquiver avec une moue dédaigneuse. Elle agrippa le premier garde au passage par la gorge et la lui arracha dans une gerbe de sang. La victime s'écroula au sol dans un gargouillis, tandis que le second garde tentait de la frapper de taille. Ichorine esquiva encore une fois le coup tout en se léchant la main couverte de sang.

- Mmm... Il coule si bien dans ma gorge...

Dans un feulement de haine, elle attrapa le poignet du second garde et le brisa d'un coup sec sans la moindre difficulté. Elle lui tordit le bras et lui enfonça son épée dans le ventre avec une lenteur calculée, avant de remonter d'un coup sec la lame. Le garde, le visage terrorisé, s'écroula lui aussi au sol, les mains crispées sur ses entrailles.
L'officier n'avait pas bougé, tétanisé par le massacre. Ichorine se baissa avec détachement vers le premier garde qui agonisait, la main tendue vers son visage. Il y eut un bruit abject, puis Ichorine se retourna vers l'officier. Elle tenait un oeil ensanglanté entre deux doigts, et ronronnait. Sous le regard horrifié de l'officier, elle le porta à sa bouche et le croqua.

- Mmm... Un met de choix, si doux...

L'officier souffla et hurla un cri de rage, se jetant sur elle. Ichorine le désarma d'un coup de pied rapide et attrapa sa tête. Elle sourit et se passa une langue gourmande sur les lèvres.

- Une viande tendre, et sucrée, pour mon plaisir... Merci, petit animal.

L'officier hurla de douleur quand Ichorine lui creva  les yeux. Puis elle lui brisa la nuque d'un coup sec, interrompant net le cri. Elle regarda autour d'elle. L'officier était mort, et les deux gardes agonisaient dans leur sang. Elle soupira.

- Oh, quel gâchis. Ils avaient l'air si mignons, dans leurs jolies petites armures... Bon, tant pis !


Alors que la cité commençait à s'agiter et que retentissaient les cris des gardes attirés par le massacre, Ichorine se fondit dans l'obscurité dans un léger rire cristallin.


***


Chapitre 3 : Je reviens


- Je vous en supplie... Pitié...

La jeune Elfe en larmes était terrorisée. Ses liens étaient si serrés qu'elle saignait, et elle tremblait dans son armure légère - de froid et de terreur.
Ichorine se pencha vers elle et posa un doigt sur ses lèvres.

- Chut, petite bestiole... Pas crier, ou sinon, maman deviendra méchante.

Elle sourit et retourna auprès du feu de camp où elle faisait rôtir un petit sanglier. Elle fit la moue.

- Cuit, mieux, chaud... Mais pas beaucoup de goût, non. Plus de sang sucré, mais la jolie dame, oui, sucré et doux.

La prisonnière se remit à pleurer.

Ichorine fronça les sourcils et regarda autour d'elle, les sens soudain aux aguets. Elle avait choisi une clairière isolée au coeur de la forêt pour y trainer la prisonnière qu'elle avait faite plus tôt. Une messagère qui avait eu le malheur de croiser sa route.
Il n'y avait qu'eux deux, mais pourtant...

- Quelqu'un ? Joli met de choix, oui... Mais où ?
- Pitié... Je vous en prie...

Ichorine marcha rapidement et souplement vers sa prisonnière et lui trancha net la gorge d'un coup de dague.

- Chut, petite bestiole bruyante. Pas seule, non. Il me faut le silence.

Debout, aux aguets, Ichorine écoutait attentivement. Il n'y avait aucun bruit, mis à part le crépitement du feu. Elle était seule.

- Où es-tu ? Viens me voir, petite bestiole...
- Être là.

Ichorine jeta des coups d'oeil rapides autour d'elle.

- Qui ? Où ? Dis-moi, petite bestiole.
- Être là. Ici.

Ichorine plissa les yeux et poussa un feulement abject, le visage déformé par une grimace de haine.

- Sors de ma tête... SORS DE MA TÊTE !!!
- Pourquoi ? Parler.
- SORS DE MA TÊTE !!!

Ichorine commença à se griffer le visage, faisant couler le sang.

- Sang. Moi aimer. Moi vouloir. Toi vouloir ?
- SORS DE MA TÊTE !!!
- SANG !

La sensation la frappa telle une vague et la fit tomber à genoux. La tête entre les mains, Ichorine se mit à hululer, submergée par ce que lui envoyait la voix mystérieuse... Une soif. Sans limite, sans frein... une soif de sang.
Ichorine finit par se taire, et se mit à rire.

- Joli. Je connais, le sang, le goût sucré sur ma langue... Qui es-tu ?
- Moi être éternel. Moi être soif. Sang. SANG !
- Oh oui ! OUI !

Ichorine, toujours à genoux, se mit à ronronner.

- J'aime le sang. Toi aussi ?
- Oui. OUI ! Aimer. VOULOIR !
- Tu veux quoi, jolie voix dans ma tête ?
- Moi chercher. Beaucoup. Longtemps. Chercher... hôte ? Accueillir moi. Aider moi.
- Qui es-tu, jolie voix ?
- Peaux-vertes dire moi Esprit Sang. Moi être peur. Moi éternel. Toujours là. Toujours soif. SOIF ! Toujours revenir. Moi apprendre. Apprendre bêtes. Apprendre... Humains ? Moi posséder Humaine. Apprendre. Apprendre mots. Mais eux tuer Humaine. Moi cacher. Guerre. Attendre. Trouver... hôte ? Elfe. Elle avoir vide dans tête. Moi prendre vide. Beaucoup sang. BEAUCOUP SANG !
- Oui... Le sang...
- Humain venir. Combattre. Lui... Lui briser moi ! Moi prisonnier ! Toujours soif, plus sang ! Tourner, rager, pleurer, hurler, sang, sang, SANG ! SANG !!!
- Jolie voix dans ma tête, si triste...
- Humain trop fort. Plus pouvoir contre lui. Moi connaître beaucoup, mais pas connaître lui. Moi... prisonnier. Soif, pas sang...
- Jolie voix dans ma tête, toute triste.

Ichorine s'était mise à sangloter.

- Moi chercher, toujours. Pas trouver.
- Mais tu es là, jolie voix ?
- Froid venir. Grand froid. Mort. Briser prison. Moi échapper.
- Bravo !

Ichorine se mit à battre des mains telle une enfant.

- Moi chercher. Soif, beaucoup soif, mais apprendre. Attendre. Chercher.
- Tu cherches quoi, jolie voix dans ma tête ?

Ichorine, toujours à genoux, attendait. Puis elle commença à s'étreindre, les yeux mi-clos.

- Chercher hôte.
- J'aime le sang, jolie voix.
- Moi savoir. Moi chercher, et trouver toi. Toi aimer sang. Toi... comme moi...
- Jolie voix dans ma tête ?
- Toi accepter moi ?

Ichorine ouvrit soudain les yeux et se leva en souplesse. Son visage était soudain devenu dur, haineux.

- Je suis Ichorine. Qui es-tu pour OSER me demander de me soumettre ?!
- Moi être soif. Moi être sang. Toi Ichorine ? Toi devenir... Sanglante. Nom Elfe avant, quand moi avec.
- Pourquoi me soumettre, abomination ?!
- Mots cruels. Moi montrer...

Ichorine retomba à genoux, tendue à se rompre. Ce qui la frappa dépassait tout ce qu'elle avait pu ressentir. Une haine absolue envers tout ce qui vivait. Et une soif, et le sang.
Les souvenirs de l'Esprit qui lui parlait l'inondèrent. Elle vit d'innombrables massacres. Des hurlements de peur et de douleur.
Et elle vit, elle sentit, elle but jusqu'à ne plus en pouvoir, ce que cherchait l'Esprit de Sang, ce qui justifiait son nom : le sang.

Les mains levées au ciel, les yeux exorbités, Ichorine poussa un long cri d'extase, puis retomba au sol, vidée de ses forces.

- Toi vouloir ?

Haletante et tremblante, Ichorine se releva péniblement. Ses yeux brillaient d'un plaisir qu'elle n'avait jamais connu jusqu'à présent.

- Jolie... Jolie voix ? Oui... je veux tout... tout ça. Je veux la jouissance.
- Toi dire.
- Je veux ce que tu es.
- Toi dire.
- JE VEUX LE SANG !
- TOI DIRE !

Ichorine éclata de rire, défiant le ciel de son poing.

- PRENDS-MOI !
- Moi... prendre.

Le hurlement d'agonie et d'extase mêlées d'Ichorine fit trembler la forêt et se voiler le ciel. Dans d'innombrables foyers, d'innombrables dormeurs se réveillèrent en hurlant de peur. Dans la nuit étoilée, la lune pleine frémit... et prit une couleur de vermeil.

Ichorine ouvrit les yeux. Ses pupilles brillaient d'une lueur rougeâtre. Elle sourit. Ses dents étaient des crocs.

- Je... suis... revenu...

SANG !
 

 

Poster un commentaire - Commentaires (0)
Créé le 02/10/2012 à 12:41:42 - Pas de modification


Chapitre 4 : Je rêve que je me réveille


Obscurité sans fin, un lieu qui n'existe pas.


...

Je

...

rêve

...

que

...

je

...

dors.

...

... Oubli...
... Vide...
... Combien de... ?
... Difficile....
... Les pensées...

...

... Combien de temps... ?

Je rêve que je rêve.

... Les souvenirs...
... On dirait que...

Je rêve que je rêve...

... Ils reviennent...
... Combien de temps depuis... ?
... Tant de souvenirs...
... Je me souviens...
... Il y a...
... Cette douleur...

Je rêve que je rêve... ?

... Douleur...
... Terrible...
... Le sang...
... Tant de sang...
... Pourq... ?

... Ma belle... Pardonne-moi...

... Cette douleur...
... Ma...
... Pourquoi tant de douleur... ?

Je rêve que je... rêve... ?

... Ma belle...
... Cette douleur...
... Je me souviens...
... Ma belle...

NON !

... Ma belle...

NON !

... Tellement de douleur...

Je rêve que je...

... Ma belle...
... Non...
... Non, pas de...

Je rêve que je...

... Ma...

Je rêve que...

Je rêve...

Je rêve...

Je...

...

Je rêve que je me réveille...

... Je...

...

Je rêve que je me réveille.

...

... Je sens... la douleur...

... Je sens la douleur ?

... Oui...

Je rêve que...

Non.
Je ne rêve plus.
Je me réveille.
Maintenant.
Je me réveille.

MAINTENANT !


***


Chapitre 5 : La douleur qui est moi


Obscurité sans fin, un lieu qui n'existe pas.


Je suis... fatigué. Combien de temps ai-je passé à dormir ? A rêver ? Ai-je seulement rêvé ? Ma tête est lourde. Mon esprit est embrumé. J'hésite. Je ne sais plus rien.
Si. Je me rappelle. Je me rappelle que je sais me souvenir. Et je me souviens.

Ma tête...

Cela fait si longtemps que je dors. Et ensuite, le rêve. Mais le rêve est fini. Ou alors, ne suis-je qu'un rêve moi-même ? Mais la douleur est si forte ! Si forte ! Je la croyais disparue, anéantie.
Terrible douleur. Terrible douleur !

Je dois... réfléchir. Cela fait si longtemps que je dors. Mais j'arrive à penser, à ordonner ma réflexion. Mes souvenirs reviennent. Et cette douleur !

Non. Non ! Je ne dois pas céder. Pas maintenant. Je dois me rappeler de tout. Depuis le début jusqu'à... De tout.


...


Les bribes de souvenirs tournent dans mon esprit. La douleur est toujours là, si terrible, si terrible ! Mais je dois me concentrer. Empêcher la douleur de s'imposer. Je dois me rappeler...
Mon serment.
Je me souviens de ce qu'on m'a appris. Une façon d'être et d'agir. Je me souviens. J'étais... chevalier. Oui. Le mot s'impose à mon esprit. La douleur est... la douleur est là, si... si terrible ! Mais... chevalier. Oui. Ce mot sonne à mon esprit comme un roc sur lequel me raccrocher.

Je dois ignorer... la douleur. Si forte ! Plus forte que celle du corps. J'ai oublié que j'ai un corps. Cela fait... si longtemps.


...


La douleur du corps s'estompe, mais celle en moi est toujours aussi forte. Elle me rend fou !
Non. Pas fou. Ce temps-là est fini. La douleur est terrible, elle me remplit, elle remplit ce vide abyssal qui m'a dévoré. Mais je sais qu'elle ne quittera jamais. Je dois l'accepter. C'est ce que j'ai appris, autrefois. Accepter, et serrer les dents, au nom de ma foi.
Non. Plus de foi. Ce temps-là aussi est fini. Il n'y a que moi. Et cette douleur ! Elle est si forte, si terrible ! Si... puissante. Je crois que...
Non.
Je... Je SUIS cette douleur. Et je sens, au coeur de cette obscurité dans laquelle je dors d'un sommeil sans rêve depuis si longtemps, je sens les ténèbres elles-même se recroqueviller. A cause de la douleur.

Oui... Cette douleur est si puissante que je pourrais... que je vais l'utiliser.
Mes souvenirs reviennent et s'organisent, et mon esprit raisonne de mieux en mieux. Et me confirment ce que je devine depuis mon réveil : je n'ai rien, je ne suis rien. Mais j'ai - je suis cette douleur.

Je sens une étrange sensation, pourtant familière. Oui, je me rappelle... je souris. C'est cela que je sens : le sourire qui tord ma bouche et plisse mes yeux. Et tout de suite après, j'entends - encore une nouvelle sensation, pourtant familière - un hurlement.
C'est moi ! Je hurle de douleur ! Une douleur physique, cette fois-ci, fulgurante ! Qui me brise et m'écrase ! Mon corps éclate, mes poumons se déchirent, ma gorge est de la lave en fusion, je vais mourir, je meurs, dans une souffrance effroyable !
Une souffrance que je connais du tréfonds de mes souvenirs. Que je n'aurais jamais dû ressentir à nouveau.

Je respire. C'est cela qui me déchire, comme elle déchire le nouveau-né qui sort du ventre de sa mère. Cela fait si longtemps que je ne respire pas.

La douleur cesse aussi soudainement qu'elle est apparue. J'entends ma respiration, oppressée, paniquée, rapide et désordonnée, puis qui se calme, qui reprend son rythme, qui réapprend.
Une sensation lancinante parcourt mon corps, venant de ma poitrine jusqu'à mes extrémités. Et j'entends un nouveau son. Régulier, puissant, venant de moi.
Les battements de mon coeur. Je reste à l'écouter battre, tranquillement, ramenant la vie dans mon corps. Cela m'apaise, et je remarque que la douleur qui est moi se mêle avec harmonie à ces battements, qu'elle accompagne et soutient mes poumons qui se remplissent et se vident sans s'arrêter.

Il me reste encore une chose à faire. Mais saurais-je m'en souvenir ? Cela fait si longtemps, si longtemps... Et cela semble si naturel à l'époque. Comment fait-on ? J'hésite.
Ce corps... Comment le mouvoir ?
J'ai oublié. Je cherche dans ma mémoire, dans mes souvenirs maintenant revenus, dans ce corps qui reprend vie, mais je ne trouve rien. Comment fait-on !
Je sens un nouveau sentiment se mêler à mon hésitation. Le désespoir. Je ne peux pas, je n'y arrive pas... Cela fait si longtemps, si longtemps...

Et je sens la douleur qui est moi. Et je lève mon bras, sans hésitation, sans crainte ni angoisse. Et je souris, à nouveau. C'est donc cela. J'ai oublié comment être, comment vivre et bouger, mais la douleur qui est moi est si forte qu'elle plie mon corps si fragile et le domine.
Je sens quelque chose de nouveau se répandre dans mon corps, venant de cette douleur. Mes veines, mes nerfs, mes muscles se transforment et s'adaptent sous la puissance de la douleur. Je lève l'autre bras, et je le sens réagir immédiatement, obéir comme pour une marionnette.

Mais ce n'est pas ainsi que la vie fonctionne. Ce n'est pas ainsi que nous avons été créés. La vie est instinctive, elle n'est pas un jouet entre les mains d'une sensation. Ce que je fais, ce que fait la douleur qui est moi est hérésie. Elle est obscénité. Elle est insulte à l'univers.
Oui. C'est ce que je suis maintenant.

J'hésite. Et la douleur qui est moi hésite. Car cela ne peut être. Mais quel autre choix ?


***


Chapitre 6 : Il me faut revenir


Etrange sensation. Des pensées tournent dans ma tête. Un serment. Un engagement.

NON !
Cela n'est plus. Je ne suis plus ce que j'étais.

L'hésitation se fait certitude. Comment pourrais-je revenir ? Comment pourrais-je arpenter à nouveau le monde ? Marcher sous le... le...
Le souvenir me fait hurler. La douleur qui est moi se tord et tord mon corps. La lumière du soleil. Rien que le souvenir suffit à me déchirer.
Je respire, je calme l'effroi qui m'envahit. Et la douleur qui est moi, qui remplit ce vide terrible en moi, cherche un moyen. Je la sens, exigeante, tyrannique. Sans pitié.

Je me souviens... De mon serment. De ce que je fus.
Pas comme cela. PAS COMME CELA ! JAMAIS !

La douleur qui est moi me force, me brutalise. Je n'ai plus qu'elle, je ne suis plus qu'elle. Sans elle, il n'y a que le vide. Abyssal. Infini. Impossible à remplir.
Et soudain, l'odeur. Elle remplit mon esprit, arrête la douleur, fait cesser le tourment du vide en moi.
Un souvenir. Une odeur âcre. Un goût dans la bouche, de métal.
Oui.
Le sang.
Et les pleurs, la folie.
Et derrière ces pleurs, derrière cette folie...

Je me souviens...

Une enfant. Une Elfe. Couverte du sang des innocents. Tant de sang que l'odeur envahissait tous les sens. Son rire. Sa démence.

Non. Pas la sienne. Autre chose. Un esprit venu d'ailleurs. Si terrible, si exigeant que ce que j'étais devenu n'a pu que le sentir et le haïr.
Je me souviens de l'Elfe, meutrière, cruelle et folle. Mais ce n'était pas elle. Je me souviens de l'esprit qui l'utilisait. Un Esprit de Sang. C'est le nom que l'on m'avait donné. Je me souviens de notre combat. Esprit contre esprit. Douleur contre folie.
J'ai vaincu.
Et les pleurs de l'enfant, sans fin et sans repos. Libre mais détruite.

La douleur qui est moi est toujours là. Elle cherche. Et trouve.
Elle est là.
L'enfant.
Son esprit est encore présent. Dans ce sanctuaire de paix que je lui ai ménagé, dernier serment prêté au nom d'une foi sans objet.
Apaisé.
Seul.
Seul... ?
SEUL !

NON ! Cela ne se peut ! Comment a-t-il pu ?!
La douleur qui est moi cherche. Je sens sa fébrilité, la mienne. Je sens... l'échec.
La douleur qui est moi cherche encore. Tord ce qui reste de mon esprit, me violente, cherche encore et toujours. En vain.
Je sais. Mais la douleur qui est moi refuse, se révolte. Je sens sa colère, sa haine, sa force... En ce lieu qui n'existe pas, mon ennemi, mon prisonnier, la raison de mon exil, a trouvé un moyen de s'échapper.

La douleur qui est moi cesse soudain. Me parle, sans mots, sans paroles. Je souris. En cette obscurité sans fin, en ce lieu qui n'existe pas, nous nous comprenons. La douleur qui est moi approuve. Je la sens, elle me remplit, mais je comprends qu'elle et moi pouvons être... alliés.

Un même but.
Un même ennemi.
Au nom des serments anciens.
Au nom de ce que je fus.
Au nom de ce qui aurait dû être et qui ne fut pas.


...


Ma décision est prise.

Je ne suis plus ce que je fus.
Je ne suis qu'une insulte faite à l'univers.
Une abomination.
Une souffrance qui fait reculer jusqu'aux ténèbres.

Il me faut revenir. Au nom d'un serment qui n'est plus.


...


Obscurité sans fin. Un lieu qui n'existe pas.

J'ouvre les yeux.
MAINTENANT !


Poster un commentaire - Commentaires (0)
Créé le 02/10/2012 à 12:45:21 - Pas de modification


Chapitre 7 : Cela commença comme un jour ordinaire...


- Alors là, v'là t'y pas qu'l'aut' bestiole, all' s'jette sur not' bestiaux pour l'boulotter !
- En effet, quel drame.
- Dame, j'vous l'fait pas dire ! Et moi qu'avions point les moyens d'l'affronter, vu qu'ma fourche, all' était rasté dans l'grange.
- J'imagine.

Edualk réprima un bâillement tout en écoutant d'une oreille distraite le récit du fermier. De toutes façons, il s'agissait toujours d'aller baffer un monstre quelconque, alors les détails... Faut dire, aller s'installer dans les Maleterres, en gros l'un des coins les plus pourris d'Azeroth, il fallait quand même chercher un peu les ennuis !

- Alors ? Y va-t-y point m'ader ?
- Hein ? Com... Ah oui, ne vous inquiétez pas, brave homme, je vais m'occuper de votre monstre. Au fait, j'y gagne quoi ?
- Dame, c'est qu'j'avions point beaucoup d'richesses, voyez. Ma j'pouvions lui d'nner da pommes. Et un coup d'pinard, pour la route.

Edualk soupira en secouant la tête. Ca valait le coup, tiens... Enfin, il était dans le coin, autant rendre service - Paladin, tout ça.

- Ca ira, brave homme. Et le monstre ? Où est-ce qu'il se terre ?
- Ben... L'bestiole, all' est toujours là. Près d'la grange. C'est-y pour qu'ça j'avions point pu prendre ma fourche.
- Où ça ? Je n'ai rien vu en arrivant.
- Dame, c'est qu'ici, c'étions point ma ferme !
- M'aurait étonné, tiens... Et la votre, brave homme, où est-elle ?
- Plus loin, vers l'couchant, près d'la mer. Faut passer la drôles de bestiaux, gros, avec da bras en trop, et la trucs tout fumeux. Pis après, y'a la Pogne de Tyr...
- La Main de Tyr ?
- Oui-da. Et c'est là. Tenez, j'va vous montrer, sur vot' carte.
- ... Vous avez installé votre ferme dans les Maleterres de l'Est ?
- Dame, c'est j'avions point l'choix ! C'est t'y un da seuls endroits où qu'ma bourgeoise all' viendra point m'asticoter ! Et pis, j'avions les Rougeaux pour m'protager.
- Ouais, mais quand même, vous n'avez pas pensé que... Mais pourquoi je m'acharne à essayer de comprendre, moi... Et vous n'avez pas été voir les Ecarlates ?
- Qu'des pêteux, ces Rougeaux ! Qu'ça cause d'la Lumière, et d'ces fadaises, que j'devions aller à'l'messe... J'a pas quitté ma bourgeoise pour r'tomber dans c'genre d'bâtises !
- Je vous comprends. Moi-même je... Enfin passons. Au-delà de la Main de Tyr, donc. Au moins, j'aurions... j'aurais pas à la chercher, cette "bestiole". Bon, ne bougez pas, je reviens.
- Ma qu'y fasse att'tion : la bestiole, all' est point commode, dame !
- Et moi, j'arrive d'Outreterre. Alors vos bestioles...
- Dame, c'est vot'peau.

Edualk remonta sur son tigre de monte et, après avoir rapidement vérifié son équipement, prit la direction de l'Est en esquivant les Morts-Vivants trainant dans la région.


...


- C'est bien désert, comme coin...

Edualk avait gagné rapidement la Main de Tyr, espérant pouvoir passer en vitesse à travers cette forteresse pour gagner le village qui était sensé s'étendre juste derrière - bien qu'il n'ai jamais eu l'occasion d'y aller, les Ecarlates n'étant pas réputés pour la qualité de leur accueil envers les membres de l'Aube d'Argent.
Ce n'était pas un de ses coins préférés, mais avec Tigrou et un peu d'agilité, tout aurait dû bien se passer.
Sauf que la forteresse était déserte. Il régnait un silence de mort, et aucune trace de vie. Malgré tout, tout était en ordre. Pas une fuite, ou un désastre, non. Plutôt... une évacuation ?

Edualk, seul sur Tigrou au milieu de la cour principale, restait silencieux, les sens aux aguets. Rien. Aucun bruit.

- Tigrou, ça sent le plan foireux.
- Graow...
- Tu es sûr ?
- Raw.
- Bizarre... Je ne vois pourtant aucune trace du Fléau. Et ils ne sont pas du genre discret.
- Graow.
- Bien sûr que je te crois. C'est juste que... Foireux, ouais.

Edualk descendit de sa monture et empoigna son arme et son bouclier.

- Heureusement que j'ai pu récupérer du matériel un peu plus efficace dernièrement. Bon, tu attends ici, j'y vais seul.

Laissant Tigrou en arrière, Edualk s'avança précautionneusement dans la Main de Tyr désertée. L'atmosphère était lugubre, sans un bruit. Et pas une trace des fanatiques pourtant d'ordinaire présents massivement.
Edualk hésita un instant devant la cathédrale, puis se décida à entrer. Le bâtiment était lui aussi vide, et surtout, il ne sentait aucune trace de sérénité - comme si la Lumière avait elle aussi abandonné les lieux.

- D'accord, ce sont de foutus fanatiques, mais quand même... Je n'aime pas ça.

Il ressortit, prit le temps de passer encore une fois en revue les lieux, puis soupira et se dirigea vers l'est, vers le village qu'il pouvait apercevoir au loin. Il fit un petit geste rassurant en passant à Tigrou, mais celui-ci semblait manifestement mal à l'aise et jetait des regards inquiets autour de lui.
Edualk franchit les murs et se retrouva dans le village. Comme à la Main de Tyr, l'atmosphère était lugubre... Non, pas lugubre. Vide.

- Mouais... Autant aller voir la ferme du plouc, histoire de régler ça rapidement.

Il prit quelques instants pour se repérer selon les indications du paysan, puis se dirigea, les sens en alerte, vers la ferme qui se trouvait un peu à l'écart. En approchant des bâtiments, il sentit une sourde inquiétude monter en lui. Il s'arrêta, re-vérifia rapidement son équipement et ses sorts, et reprit sa route.

- Je suis dans les Maleterres... Rien ici ne peut être vraiment dangereux pour moi... à condition de rester prudent... Bordel...

Il arriva devant une grange, qui lui cachait le reste de la ferme et notamment le champ. Il s'arrêta, l'oreille tendue, et...


***


Chapitre 8 : SANG !


Un bruit. Régulier.
Edualk fronça les sourcils. Il connaissait ce bruit, un bruit familier, mais où l'avait-il entendu ? Il resta silencieux et caché, réfléchissant, et...

- Bordel...

Il avait juste soufflé ce juron, évitant de faire du bruit.

- Il bouffe... C'est le bruit de quelqu'un qui bouffe... Salement, en plus...

Edualk grimaça en entendant des craquements, ceux d'os qui se brisent et se déchirent. Puis un bruit de mastication.

- J'ai trouvé ma bestiole... Et si tout ce merdier est de son fait... Bon, allons jeter un oeil. Au pire, j'ai ma bubulle...

Edualk prit une profonde inspiration, redressa son bouclier et resserra sa poigne sur son marteau, et contourna la grange.

- C'est quoi ce...

Il s'était arrêté. Il venait de trouver les habitants manquants - ainsi que des soldats de la Main de Tyr, à en juger les débris jonchant le champs.
Au milieu d'ossements.
Brisés.
Innombrables.

Edualk déglutit, et reporta son regard vers le centre du champ.
Au milieu du champ, assise en tailleur, se tenait une femme. Elle semblait jeune, presque adolescente. Ou plutôt... une Elfe, dont les cheveux étaient d'un blond si clair qu'ils en étaient presque blancs. Elle était vêtue d'une fine armure en mailles, mais on ne le remarquait pas de suite.
Edualk, tendu, prit le temps de vérifier autour de lui, mais en dehors de la femme, il était seul. Il revint sur elle.

Oui, on ne remarquait pas de suite sa tenue - et qu'elle était plutôt bien faite, d'ailleurs. Mais c'était accessoire. Elle était couverte de sang. Frais.
Les bruits venaient d'elle. Elle tenait dans les mains quelque chose qu'Edualk se força à ne pas regarder de suite, qu'elle croquait et déchirait et arrachait, dévorant à pleine bouche.

Edualk prit une profonde inspiration, et essaya de la jauger. Jeune, fragile, probablement peu aguerrie. Sans armes apparentes. Une proie facile pour lui, qui venait d'arpenter l'Outreterre en long et en large. Mais assise au milieu d'un champ couvert d'ossements. Et dévorant - il prit sur lui et regarda - un petit corps.
Un bébé. Impossible que ce soit autre chose.
Edualk respira profondément, et le regretta. L'atmosphère puait le sang, une puanteur extrême, envahissante, exigeante. Alors que seule la jeune femme en montrait - aucune trace ailleurs.

- Bordel...

La femme s'arrêta soudain. Elle leva lentement la tête vers le Paladin, les yeux fermés. Il remarqua son menton dégoulinant de sang frais, sa chevelure en désordre, la jeunesse de ses traits.
Puis elle ouvrit les yeux.

Edualk eut juste le temps d'apercevoir deux taches rouges, des yeux noyés de sang, avant de subir... l'attaque ? Ce ne pouvait être qu'une attaque. Comme un vague formidable qui le frappa, le fit plier les jambes et poser le genou à terre.

SANG

Il sentit le goût du sang envahir sa bouche, l'odeur âcre et métallique saturer son cerveau. Et les deux yeux de la femme, noyés de sang, emplis d'une soif sans limite.

SANG

- Non... Je... Bord...

SANG

La vue brouillée et les sens paniqués, Edualk devina plus qu'il ne vit la femme se lever lentement, et marcher vers lui.

SANG

Il tenta de se lever, trébucha, et retomba à genoux.

SANG

- Hop... Bub... Bub...

Il essaya de lancer le sort créant autour de lui une bulle protectrice, dernier rempart en cas d'adversité, mais son esprit était incapable d'aligner une pensée cohérente.

SANG

La femme se rapprochait, lentement, son regard braqué sur le Paladin qui essayait, malgré tout de se relever. Elle tendit la main, une main aux ongles anormalement longs et rougeâtres, tandis qu'une sorte de feulement abject sortait de sa gorge.

SANG

Edualk tendit ce qui restait de sa volonté pour brandir son bouclier, mais il pesait des tonnes et il n'avait plus de force.

SANG

La femme s'approchait jusqu'à presque le toucher. Une goutte de sang pointa de sa main et le toucha au visage. Le contact lui fit l'effet d'un choc. Utilisant ce qu'il restait de sa force, Edualk bondit plus qu'il ne se releva, le bouclier en avant, et en frappa la femme.

SANG

Il retomba à genoux, épuisé, mais sentit alors des crocs l'agripper par le col et le soulever de terre. Par pur réflexe, il réussit à agripper la fourrure de Tigrou qui venait de se précipiter et à monter sur son dos. L'énorme tigre de monte fit un dérapage et bondit, laissant la femme, la ferme et cette vision d'horreur derrière lui.

SANG...


***


Chapitre 9 : De nouveaux ennuis


- Bordel... C'était chaud...

Edualk, couché sur le sol et haletant, réussit à se tourner sur la côté et vomit. Tigrou, en sueur et haletant lui-aussi, se tenait en tremblant devant lui, le regard halluciné.

- Au moins... Ca t'a fait... perdre... quelques kilos... mon vieux...

Le Paladin sourit faiblement à son compagnon qui lui répondit par une grimace. Puis, par un suprême effort, et les jambes flageolantes, il se releva et se passa une main hésitante sur la nuque.

- Super, je saigne... T'as de sacré crocs, tu sais.

Le tigre de monte eut une grimace amusée, mais Edualk sentit que le coeur n'y était pas. Tigrou l'avait amené jusqu'à l'entrée de la Main de Tyr, loin du village, loin de l'horreur et du...

SANG

- Merde !

Edualk leva la tête, en alerte, mais ils étaient seuls tous les deux.

- Je l'ai quasiment entendu... Jamais je...
- Row...
- Oui, ses yeux... Je connais... Mais... Non. C'est une histoire finie. Définitivement.
- Graow ?
- Aucune idée. Il faudrait que j'aille voir le vieux Nain. Vu que c'est lui qui...
- RAOW !

Edualk leva soudain la tête vers le nord-est. Une gigantesque ombre venait d'apparaitre, et dans le ciel...

- C'est quoi encore ce bordel... On dirait...

Edualk sentit comme une main pesante sur son âme, tandis qu'il regardait d'un air effaré la raison de l'ombre qui couvrait les Maleterres.
Une citadelle du Fléau venait d'apparaitre. Déjà, des formes ailées s'en échappaient. Un vacarme assourdissant commençait à se faire entendre vers le village.

Edualk ferma les yeux et se concentra. Respirant profondément, il fit appel à la Lumière, sentant la présence apaisante le baigner... l'inonder. Jamais il n'avait senti la Lumière aussi forte. Ou plutôt non. Il l'avait déjà senti, autrefois. Les Maleterres étaient encore Lordaeron, et il vivait tranquille avec...

Edualk ouvrit les yeux. Son coeur battait à toute vitesse. Il leva à nouveau les yeux vers le ciel, vers la formidable citadelle dominant la région.

- Le Fléau revient, Tigrou. Ca ne peut vouloir dire qu'une seule chose.
- Raow ?
- Ouais. Il faut prévenir tout le monde.

Edualk rangea ses armes et monta sur le dos de sa monture qui s'élança de suite vers l'ouest. Alors que le paysage défilait autour de lui, il réfléchissait.

Ainsi cette... "chose" que le vieux Gloïn avait affronté autrefois était revenue. Comment l'avait-il appelé, déjà ? Ah oui : l'Esprit de sang. Venu de Draenor au moment de l'ouverture de la Porte Noire. Il n'avait jamais vraiment expliqué comment il avait réussi à le vaincre et à le faire disparaitre d'Azeroth. Mais manifestement, cela n'avait pas suffit.
Et surtout, la présence de la citadelle volante ne pouvait annoncer qu'une seule chose : le retour du Fléau.
Le retour d'Arthas.
Et la guerre.

Edualk serra les dents. Le retour d'Arthas... Et enfin l'occasion de lui faire payer ses dettes...
Il sourit : enfin !


***
Poster un commentaire - Commentaires (0)
Créé le 02/10/2012 à 12:49:07 - Pas de modification
Pages: 1   2   3