Asteroth
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[J'ai sûrement vu un peu trop grand par rapport à la longueur de la musique, désolé ^^'
Au départ un simple "avant-combat" entre deux guerriers, l'optique du texte a changé au dernier moment avec cette touche féminine.
Enfin c'est plus une touche à ce niveau-là...

Ecrit sur


La plate-forme s’élève doucement, sans heurt. Elle, s’y tient dessus sans un seul signe de nervosité. Elle est incroyablement calme et regarde sans les voir les fines lignes noires qui séparent chaque pièce constituant le long tube, et qui défilent du haut vers le bas. Pas le moindre signe de tension tandis que le monoplace prend de l’altitude au centre du cylindre qui constitue sa cage d’ascenseur. La claustrophobie est proscrite dans un tel élévateur, pourtant à ciel ouvert, mais elle est parvenue au sommet.

Et son adversaire est arrivée, synchronisée, par le même biais.

Les socles des ascenseurs se sont fondus dans le sol chromé de l’arène minimaliste, une simple dalle circulaire située à une hauteur vertigineuse.
Elles se toisent mutuellement. Pour elles, le duel est déjà engagé. Immobiles, leur regard glisse de haut en bas et de bas en haut, parcourant chacune la silhouette svelte de l’autre. S’il n’a aucun effet sur l’une ni sur l’autre, le charme qu’elles dégagent en aurait déjà fait succomber plus d’un. Car la masculinité de leur art ne fait que décupler leur féminité aux yeux des hommes. Chassez le naturel, et vous savez ce qu’il advient. Beautés fatales.
Les rictus de défi apparaissent, sourires insolents d’êtres prêts à tout pour démontrer leur écrasante supériorité. Les yeux pétillent de malignité. Les mains se posent délicatement sur les hanches et le dos se raidit, le sourcil droit se lève. Elles affichent l’air le plus hautain possible, comme si l’adversaire n’était pas digne d’elles, pas assez à la hauteur à leur goût. Symétrie parfaite des comportements. Elles. Sont parfaites. Parfaites dans un décor parfaitement épuré à l’altitude parfaite. Exposées à un danger parfait. Et c’est là, lorsqu’elles s’en rendent compte, qu’éclate la seconde phase.
Une déchirure, traînée blanche sur le sol étincelant, mur ténu de poussière mouvante, les sépare soudain. Deux énergies s’affrontent, s’opposent. Les leurs. La dalle, la ville, la plaine, la Terre, l’Univers deviennent deux. Deux moitiés antagonistes. Manichéennes. Pas de nuances possibles, c’est un camp ou l’autre. C’est ce monde là que leur opposition totale façonne, c’est dans celui-là que va s’amorcer les révolutions lors d’une troisième phase inévitable, manifestation universelle d’une gravitation universelle dans un système binaire, mû par la pulsion universelle qui siège en tout combattant qui se respecte.
Elles se tournent autour. Avec une infinie lenteur. D’un pas calculé, faussement nonchalant. Il est en vérité totalement sous contrôle, car une erreur et la crédibilité, et la superbe, et la domination s’effondrent en une seule fois. Tout geste maladroit signera la défaite. Des gestes dont une combinaison moulante vient encore renforcer le pouvoir ensorceleur. Elles se tournent autour. Et leur démarche est magnifiquement chaloupée, elles en rehaussent encore la sensualité. Impitoyables. Elles ne laisseraient pas un seul mâle indemne, si seulement ils étaient là. Mais ils sont là, scotchés à leur écran, devant les images que fournissent les caméras automatisées. Ils sont déjà tous fous d’elles. Et ils choisissent leur camp. Eux ne voient rien du duel qui se déroule, rien de leur opposition surnaturelle, pour eux ce ne sont que les prémices, mais pour elles, le combat est déjà presque acharné. Elles se battent sur tous les plans, et la séduction brute en fait partie…
Elles se tournent autour. Avec une infinie lenteur. Elles ne quitteraient pour rien au monde leur combinaison de combat. Parce que celles-ci sont faites pour le combat, mais je vais le dire : parce qu’elles sculptent aussi parfaitement leur silhouette. Elles. Sont parfaites. La tenue dissimule habilement les courbes pures qu’elle souligne.
Elles se tournent autour… et leurs regards ne se sont jamais décroisés. Leur sourire se fait carnassier. Elles sont chasseresses du même gibier. Elles. Sont… redoutables. En cet instant, rien ne saurait stopper leur ronde incessante. Rien. Encore moins l’insignifiance d’un homme. Le mur d’une confrontation muette et sourde les sépare, et rien ne saurait le briser, de même que l’Univers qu’elles ont scindé ne se réduit plus qu’à un demi-disque. Le Néant, à l’extérieur. L’Insignifiant, écrasé par leur seule volonté.
De deux trappes diamétralement opposées émergent deux supports garnis d’armes de corps à corps. Qui oserait penser qu’elles se précipiteraient pour s’équiper ? Leur ronde n’en est même pas perturbée. Elles se tourneront toujours autour et ne briseront jamais ce qui les unit : leur opposition farouche, leur mur, indestructible pour le reste du Monde. Elles effleurent enfin les armes et choisissent l’une une hallebarde et l’autre un bâton renforcé. Elles préfèrent le contondant au tranchant, peut-être pour plus de noblesse dans l’affrontement, plus de panache, plus d’endurance…

Elles se touchent presque et les faux sourires s’effacent. C’est à partir de maintenant que le système s’effondre.

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Créé le 12/09/2008 à 00:52:29 - Pas de modification

[Musique du Temps : Mine Host - Oceansize

Avec du recul, je me rends compte qu'il est extrêmement compliqué vu l'accès qu'en a le lecteur, il ne faudra donc pas être gêné du caractère très flou et nébuleux du texte, et l'accepter comme tel.
Ce texte vient du duel contre Teclis (qui a gagné) avec pour contrainte une absence quasi-totale de narration.
Le côté nébuleux vient de là : impossible de procéder à une explication complète à travers un dialogue sans dénaturer ce dernier ni être affreusement lourd, lourdeur qui est peut-être déjà présente dans ce texte.
Il fut difficile à écrire mais... il me plaît ^^
Bonne lecture !]




Regarde ta montre, et dis-moi quelle heure il est.

L’autre affiche une mine étonnée.

Je ne comprends pas ce que tu me demandes, tu as ta propre montre.

Oui, mais ce n’est pas mon temps qui m’intéresse, c’est le tien.

Le mien ? Ta propre montre ne te suffit pas ?

Bien sûr que non, oserais-tu sous-entendre que nous posséderions la même heure ?

Tu as raison, ce serait absurde. Mais je ne comprends toujours pas l’intérêt de ta demande.

Je suis curieux, tout simplement.

Curieux de mon temps ? A quoi pourrait-il bien te servir ?

Pose-toi plutôt la question de savoir à quoi me servirait le temps si j’étais le seul à pouvoir le mesurer.

A acquérir l’éternité ?


Le quémandeur d’heure hausse un sourcil.

Comment ça ? C’est une réponse à laquelle je ne m’attendais pas. Je pensais plutôt que cela supprimerait le temps, et donc nous, par la même occasion.

Tu veux dire toi, puisque si seul ton temps existe dès le départ, alors moi je n’existe pas. Mais quand je parlais d’éternité, je voyais les choses ainsi : est-ce que mon temps n’est pas là pour limiter le tien, et inversement ?


Il se tait, attisant l’impatience du premier.

Mais explique-toi ! Tu me parles comme si je comprenais déjà ton idée.

Lorsque tu t’adresses à moi, que ressens-tu ?

De l’énervement, tant que tu resteras aussi obscur !

Alors calme-toi et réponds correctement.


Le quémandeur se laisse happer par ses réflexions.

Ce que je ressens lorsque je te parle… je dirais que je ressens le poids des années qui nous séparent. Tu vois ce que je disais ? Par ta présence, je ressens le temps.

A vrai dire, tu ressens mon âge. Peut-être me vois-tu vieillir. Et dans ce cas tu vieillis avec moi. Autrement dit, sans moi, tu ne vieillis peut-être pas.

Arrête de dire des bêtises, je ne suis pas au-dessus du temps.

Si, tu l’es. Tu n’es pas un homme, à ce que je sache. Tu n’es pas une enveloppe, tu n’es pas un corps, tu n’es pas une mécanique, tu es une empreinte. Une empreinte dans le temps. D’autant plus ancrée dans le temps que tu es une empreinte intemporelle.

Non ! Je suis moi ! Un homme ! Le Présent ! Périssable, vivant ! Je ne suis pas qu’une empreinte ! Je suis une âme et un corps !

Vivacité de ta condition. Regarde autour de toi.


Le « sage » lève ses bras à demi pour inviter le quémandeur à observer ce qui l’entoure.

Pourquoi le monde est-il noir ? Suis-je mort ?

Pas du tout, sinon je ne serais pas là. Mais tu n’es pas un homme, tu n’es plus un homme donc la question de la mort ne te concerne plus. Tu t’es décrit comme « Le Présent ». Si un homme avait utilisé cette dénomination, il aurait naturellement dit « Mon Présent ». Laisse-moi te dire que je suis malgré tout un peu perdu au sujet de ta nature. Car je n’ai pas contredit tout ce que tu me disais auparavant pour la simple et bonne raison que tu pouvais aussi être dans le vrai, bien que je ne puisse prétendre détenir aucune vérité.

Alors, où me donnes-tu raison ?

Tout dépend. Tout dépend si, en te proclamant le Présent, tu étais proche de la réalité que tu décrivais ou si, en te trompant sur ta nature, tu t’approchais de ma description. Toute la question est basée sur le fait que oui ou non, tu sois une empreinte ancrée dans le fleuve du temps. Es-tu une ancre amarrée dans le lit du fleuve ou une empreinte qui, contrairement à ma vision des choses, suit son cours ?

Je ne saurais pas te répondre…

Paradoxalement, seul le temps nous le dira.

Mais oui, c’est exact !

Qu’y a-t-il ?

Seul le temps nous le dira, n’est-ce pas ? Ne t’ai-je pas interrogé sur ton temps ? Nous aurons la réponse !


Le « sage » fut pris au dépourvu.

Quand m’as-tu interrogé sur mon temps ?

Lorsqu’on s’est rencontrés, bien sûr ! Je t’avais demandé de regarder ta montre.

Exact. Mais étrange.

En quoi est-ce étrange que de se renseigner sur ton temps ?

Ce qui est étrange, c’est que je ne saurais pas dire si nous nous sommes rencontrés avant que tu me demandes l’heure, ou après.

Bien sûr que si, c’est dans l’ordre des choses ! Il faut bien que je te connaisse avant de te demander l’heure.

Non.

Bon, ne joue pas sur les mots, je voulais dire par « connaître », te connaître de vue, enfin… te voir, savoir que tu existes, comment pourrais-je le dire autrement ?

De quoi avons-nous parlés avant que tu ne fasses ta demande ?


Un brusque silence s’intercale entre les deux interlocuteurs.

Tu vois que ma question a du sens, et que l’ordre des choses est plus sournois que ce qu’il veut bien nous faire croire. Méfie-toi des évidences, lorsqu’elles sont trop évidentes.

Je ne comprends plus rien. Comment ai-je pu te poser cette question si tu n’existais pas à ce moment-là ?


Le « sage » se mit à rire.

Tu avais le choix entre trois types de questions, et tu as choisi la plus insignifiante ! Je trouve infiniment plus d’intérêt en celles-ci. Quand m’as-tu demandé l’heure ? Et pourquoi ?

Eh bien… euh… quand… il y a quelques minutes je pense. Quoique je n’ai plus la notion du temps.

Effectivement, puisque tu réponds de travers.

Tu m’as demandé quand !

Et tu me réponds comme si nous savions que le temps existait ici. Alors que c’est ce que nous cherchons à savoir.

Mais… vraiment ? Quand cela est-il devenu notre objectif ?

Depuis que nous cherchons à savoir si tu suis le cours du temps ou non.

Mais le temps existe, puisque nous parlons, puisque nous évoluons !

Nous parlons, mais nous ne savons pas si nous évoluons. Tu fais une confusion entre deux temps, presque trois. Nous ne savons pas si nous sommes changeants. Autrement dit, nous savons que les heures de nos montres existent et avancent, mais nous ne savons pas si elles sont inscrites dans le mouvement des aiguilles d’une troisième, ou si elles sont piégées dans leur immuabilité. Nous possédons l’individualité, mais sommes aveugles au sujet de la globalité.


Le consultant des temps se pince l’arête du nez en fermant les yeux, comme pour tenter de remédier au tournis qui menace de s’emparer de lui.

Garde la tête froide, je n’ai fait que reformuler ce que je te disais depuis le début.

Si tu veux que je garde la tête froide, il va falloir arrêter de m’embrouiller. Nous parlons, nous progressons donc dans le temps, nous ne sommes pas figés, donc nous sommes changeants !

C’est juste… si nous ne considérons qu’un seul temps. Mais j’ai l’impression que tu ne sais même pas ce que tu es.

Je t’avais dit que j’étais un homme, mais tu m’as répondu que non.

Tu es issu de l’homme que tu crois être. Tu es… sa tranche de vie, l’ensemble de ce qu’il est. Ses pensées, ses sentiments, tout ce qui exclue son enveloppe extérieure. Tu comprends maintenant ?

Je comprends qui je… enfin ce que je suis, mais ça… hum… s’arrête là.

Je fais du mieux que je peux, tu sais. Cependant, tu n’as pas été désarçonné lorsque je t’ai annoncé acquérir l’éternité.

Eh bien oui, ce n’est pas quelque chose de bien compliqué.

Parce que tu as cru que je parlais de l’éternité dans ton temps à toi. Or tu n’es pas un homme, la question de mort ne te concerne pas, donc il est évident que tu es déjà éternel en ce sens. Reste à savoir si tu es éternel dans le temps qui nous entoure.


Le « sage » pesa ses mots.

Autrement dit, si ton éternité a une fin.

Tu te mets à dire des inepties.

Non, pas du tout. Encore une fois, cela revient à ce que j’ai dit plus tôt, et ça ne t’avait pas fait réagir. Tu te proclames Présent, n’est-ce pas ? Déjà, l’ineptie est là. Tu ne pourras jamais être le Présent, puisque penser le présent, c’est l’inscrire dans le passé. Mais es-tu un Présent de plus en plus passé, ou un Passé jamais bien loin du présent ? Une tranche de vie immuable, ou une tranche de vie qui évolue avec l’homme qui la détient ? C’est ce que j’essaie de te faire comprendre, c’est cette question qui est importante.

Bon… l… laissons ces questions là de côté, si tu le veux bien. Pourquoi t’évertues-tu tant à savoir tout cela ?

Parce que si je comprends ce que tu es exactement, j’ai une chance de comprendre pourquoi je suis ici.

Mais donc toi au moins tu sais qui tu es.

Ce que je suis, nuance. Et je n’arrive pas à croire que tu puisses me sortir une telle chose ! Tu ne me reconnais donc pas ?

Je devrais ?

Evidemment ! C’est toi qui m’as appelé !

« Appelé » ?? Q…


Le chercheur d’heure balbutie, tant le mot qu’il s’apprête à prononcer le trouble et l’horrifie.

Qu… quand ?

Lorsque tu m’as demandé l’heure. Tu ne me reconnais toujours pas ?

Pourquoi demander l’heure ferait appel à toi ?

Parce que je suis le Futur ! Et tu es tourné vers lui, enfin je veux dire, vers moi.

Eh bien ? Au moins je comprends pourquoi tu es ici, si tu es mon futur !

Eh bien moi je ne comprends pas comment c’est possible. Ce doit être une anomalie. Je ne comprends pas comment tu peux avoir accès à moi. Tu n’es pas censé pouvoir communiquer avec moi. Je suis censé être inaccessible pour toi, sauf…

Sauf ?

Sauf si je suis un projet d’avenir, une invention, un idéal.

Donc tu as compris pourquoi tu es ici !

Non. Je suis comme toi, une tranche de vie. Pas une invention. J’incarne toutes les pensées et les sentiments de cet homme, un temps plus loin. Ma présence est étrange.

Un temps plus loin ? Combien de temps plus loin ?

Qu’en sais-je ? Lirais-tu l’heure sur ta montre ?

Evidemment ! C’est bien ce pourquoi elle est faite !

Ne t’ai-je pas déjà mis en garde contre les évidences ? Si tu es si sûr de toi, regarde donc l’heure qu’il est…


L’Errant du Temps s’exécute mais s’affole aussitôt.

J’ai… j’ai perdu ma montre !

Tu vois.

Mais… mais je n’ai donc plus de temps ! Je vais m’éteindre, je vais…

Calme-toi.

… je vais disparaître !

Calme-toi ! C’est complètement faux. Sais-tu ce qu’est le temps ? Il a tellement de définitions et d’interprétations. Voici l’interprétation que je lui donne : le temps, ce sont des chansons. Des discussions. Des échanges. Des pensées. Des états. Le temps, ce sont des sentiments. Autrement dit…


Le Futur appuya à nouveau ses mots.

D’une certaine manière, tu incarnes ton propre temps. Et ce que tu appelles Seconde, Minute ou Heure peut maintenant se traduire en Confusion, Mépris ou Amour. En Errance, Humiliation ou Félicité. En Chagrin, Joie ou Plénitude. N’est-ce pas merveilleux que de constater qu’ainsi, tu disposes d’un florilège d’unités pour caractériser ton temps ? De le voir absorber la couleur de tes émotions ? Il en devient encore plus universel. Il n’a plus ni une ni deux dimensions comme nous venons d’en débattre, mais mille ou un million, en toi. Presque universel dans l’universalité. Pas d’ineptie là-dedans, loin de là.
Ta montre, c’est toi.


Je crois… je crois que je commence à comprendre…
Il est plus facile d’imaginer pourquoi je t’aurais demandé l’heure, ainsi…


C’est exact, tu dois commencer à entrevoir ce que moi je vois. C’est d’ailleurs ce qui, pour moi, n’a aucun sens…

Et je dirais que finalement, savoir si je suis Présent passé ou Passé presque présent n’en a pas plus.

Peut-être. Pour nous. Pour l’homme que nous représentons, ce ne doit pas être le cas.

Bon, je n’ai plus qu’une seule chose à demander…

Ah ? Quoi donc ?

Tu es là pour ça, après tout. Alors, une bonne fois pour toutes, je te prie de me répondre. Consulte ta montre, et dis-moi quelle heure il est !


Le Futur soupira.

N’as-tu donc pas compris que, de ce fait, je ne pouvais pas répondre à cette question ? Bon, on recommence…
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Créé le 12/09/2008 à 00:53:26 - Pas de modification
Il est dit…
Il a toujours été dit que le temple secret de Madalen’yr serait un jour le témoin d’un événement remarquable…
C’était ce que les disciples se plaisaient à dire, tant ce temple dédié à la Magie accueillait les sorciers et apprentis les plus extraordinaires, et ses arcanes étaient réputés puissants.
C’était ce qu’il avait toujours été dit.
C’est ce qu’il arriva.



Alors que tous, mages et sorciers, prêtres et moines, apprentis et gardiens, se mirent en état de méditation pour parfaire leur maîtrise spirituelle sur la plus haute terrasse du temple montagneux, un phénomène étrange se produisit. Dans les tréfonds de l’édifice rocheux, au sein même du pic escarpé, dans la salle la plus isolée, la plus profonde, la plus majestueuse et la plus mystique, la Magie même prit forme. Les volutes aux reflets nacrés, fils d’or et d’argent, d’orange et de rouge, se concentrèrent, attisés par les esprits des magiciens. Ils se réunirent, se condensèrent, se tressèrent, s’organisèrent. Et l’Enfant de la Magie naquit.
C’est le doyen des mages qui le découvrit le premier, l’un des seuls à pouvoir accéder à ces lieux hautement sacrés, si sacrés que, malgré son âge et sa sagesse, le vieil homme s’apprêtait à vilipender l’enfant pour avoir réussi à tromper les gardiens de la salle. Un tel sacrilège ne devait pas rester impuni, et la punition allait s’avérer sévère… à ceci près que d’étranges marques sur le torse nu du jeune garçon, ainsi que son accoutrement, interpellèrent le sorcier. La stupeur s’empara des traits de ce dernier, lorsqu’il reconnut dans ces marques un dialecte ancien.

En cet Enfant s’incarne la Magie pure.
Il prendra le nom d’Ecklam’yr, fils de la Déesse de la Magie Madalen’yr.
Dans ce temple sacré qui m’est dédié, vous le formerez aux Arts subtils et ne le libérerez qu’une fois qu’il se sentira homme, afin qu’il aille à la rencontre de sa destinée.


Et les cicatrices disparurent alors comme par enchantement. Le vieil homme profondément troublé entraîna l’enfant avec lui, et la nouvelle se répandit parmi tous les disciples madalans. Même les plus réticents crurent le mage, car alors sa personne se retrouvait baignée d’une aura incroyable, pure, divine, une aura bien différente de son aura magique propre, et rendait son discours incontestable.
Ainsi l’Enfant de la Magie fut-il élevé avec un soin tout particulier par les adeptes, qu’ils soient pratiquants de l’Art ou simples adorateurs. Mais si l’éducation ne posa pas de problème, l’apprentissage de l’Art qui lui avait donné naissance était tout autre. Malgré son origine, Ecklam ne parvint pas à mettre en pratique l’étape fondamentale nécessaire à la libération d’énergie spirituelle, cette sorte de plongée au fond de l’âme pour en extraire la vitalité. Il tenta pendant des années, sous la tutelle des plus grands sorciers madalans, mais rien n’y fit. Son âme, pourtant certainement la plus apte, la plus capable à effectuer des prouesses dans l’Art de la Sorcellerie, demeurait hermétique à sa volonté. Alors, en parallèle à toutes ces tentatives infructueuses, il apprit l’Art du Combat auprès de l’un des rares moines guerrier du temple, seule alternative.
Le maniement du bâton ne fut qu’une bien maigre compensation à ses yeux. Bien qu’il n’ait jamais vu de magie à l’œuvre, car sa pratique était interdite à l’intérieur du temple, il savait que l’Art Spirituel le fascinerait. Au fil du temps, son désir ne fit que s’accroître, et cette interdiction formelle s’avéra de plus en plus pesante. Il fallait qu’il s’en soustraie, qu’il découvre, en d’autres lieux, et fit part de sa volonté à ses précepteurs.
Ces derniers en discutèrent longuement entre eux, et finirent par tomber d’accord. Oui, c’était là ce que la Déesse leur avait annoncé. Il était temps pour Ecklam de quitter le temple, et de grimper d’autres rocs, de marcher sur la terre ferme, d’inspirer un air différent, certes peut-être moins pur mais peut-être chargé de magie ? Le jeune homme l’espérait…

____




Le guerrier sirotait tranquillement son hydromel, au milieu d’un léger brouhaha, accoudé au comptoir d’une minuscule taverne. Il était étonnant d’ailleurs qu’une telle taverne puisse exister au sein d’un village aussi perdu au fin fond de la cambrousse. L’homme profitait de ce petit moment de répit, entre deux contrats. Non pas qu’il soit véritablement mercenaire, mais son existence solitaire le poussait à voyager. Il remplissait alors les contrats qu’il trouvait sur son chemin pour financer son périple. Mais cette pause fut perturbée…

Bonjour aventurier ! Vous êtes nouveau dans la région ?

Le guerrier adressa un regard noir au garçon qui l’abordait…

Hé gamin… on ne t’a jamais appris qu’il ne fallait pas parler aux inconnus ? C’est toi le nouveau dans cette taverne. Tavernier ! Ressers-moi une chope d’hydromel ! Qui c’est ce gamin ?

[Tavernier] Ah ce gamin là ? Ça fait une semaine qu’il est ici, à peine.

Mais… vous m’avez pourtant l’air à peine plus âgé que moi !

L’expérience p’tit, l’expérience. Je suis jeune… en apparence. Qu’est-ce que tu m’veux ?

Oh rien, je voulais juste faire connaissance !

Et bien va faire connaissance ailleurs tu veux ? C’est pas le moment de me déranger. Et si tu veux un conseil, évite de vouloir faire connaissance avec des types comme moi, ou tu finirais bien égorgé dans une ruelle. Il y a des belliqueux parmi les guerriers…

Je saurai m’en souvenir, mais vous vous ne l’êtes pas, n’est-ce pas ?

L’homme baissa la tête et se massa lentement les yeux en poussant un soupir non dissimulé, signe d’un profond agacement.

Dis… c’est moi ou t’es buté ? Tu ne veux pas me lâcher la grappe ?

Il releva le nez et vit que l’autre le détaillait.

Ils sont beaux vos fourreaux…

Oui, oui, très beaux, très beaux… bon, je vois que je ne vais pas pouvoir être tranquille…

L’homme aux sabres se leva de son tabouret surélevé et marcha vers le panneau des annonces.

Vous vous en allez déjà ?

Le garçon passa derrière lui et s’apprêta à partir.

Bon ben au revoir m’sieur.

Au rev…

On entendit la plainte de l’acier, celle qu’il pousse lorsqu’on le libère de son étui, suivi d’un silence de mort. Les petites querelles ont toujours été monnaie courante dans les bars, mais lorsqu’il s’agissait de dégainer un sabre, il n’y avait plus de quoi rire.
Le plat de sa lame richement ornementée calmement posée sur l’épaule du garçon qui n’osait bouger, le guerrier se racla la gorge pour s’excuser du climat pesant qu’il venait soudain d’instaurer avant de prendre la parole, s’adressant au dos de l’intéressé.

Dis-moi… si je porte ma main à ma ceinture, combien y a-t-il de chances pour que je la referme sur le vide ? Il n’y a pas que mes sabres que tu as remarqués, je me trompe ?

Le garçon se mit à trembler. Personne ne bougea pendant plusieurs secondes.

Allez, rends-moi ma bourse. Immédiatement.

Et la poche tomba sur le sol, tintinnabulant à cause de son contenu. L’adolescent courut aussi vite que possible en hoquetant et violenta la porte avant de sortir.

Sage décision.


D’un geste d’une grande habileté, il fit pivoter son arme d’un coup de poignet et la ficha directement dans son fourreau. Il ramassa tranquillement ses pièces d’or avant de regagner le comptoir. Lentement, le silence se disloqua.

[Tavernier] Oh Freyden ! T’y es pas allé de main morte là quand même ! Ce n’est qu’un gamin !

Raison de plus pour le faire réfléchir…

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Créé le 12/09/2008 à 19:11:08 - Modifié le 05/07/2009 à 03:25:08

[Ça commençait à dater hein ? Il est de retour avec des mots tout neufs !

Ceux-ci ont été écrits sur cette playlist.
Du Coldplay et du U2, ça devrait plaire à tous.
Je pense que les trois chansons conviennent à ce texte. Clocks peut-être un peu plus.
En fait, je dirais que commencer et finir la lecture avec est le mieux, mais bon, on ne peux pas tout avoir...

Et bonne lecture, évidemment !]



Urgence. Alarmes et branle-bas de combat. C’est la panique à bord. Quelque chose a lâché.

Mouvements de masse. Affolement, frayeur, effroi. Crise. Désinformation. Les gens ne veulent pas de ce qui leur semble être un véritable suicide collectif, en orbite.
Car c’est un module de ravitaillement en tous genres qui vient d’échouer son arrimage. C’est le grain de sable dans une mécanique déjà si bancale, le rocher pour la tondeuse à gazon. Plus sérieusement, l’astéroïde pour la station orbitale. C’est, donc, une capsule de ravitaillement pour un génocide dans son sens le plus large, sans distinction aucune, la capsule de cyanure en libre service. Sauf que tout le monde, un joli petit pan de l’humanité, est dans le même bateau.

Et dans ce tout petit pan, il y a un minuscule petit pan, de spationautes. Des spationautes qui se sont réunis à la va-vite dans un tout petit pan de la station. Dans la centaine qu’ils constituent, certains sont clean, certains sont sérieux, certains sont tendus, certains sont idiots, certains sont déterminés, certains sont désespérés, certains sont en caleçons, certains ont une auréole de lait sur la bouche, certains ont les lunettes de travers, certains sont pieds nus, certains puent la clope -l’hérésie !-, certains ont des épis. Un seul est terrifié, un sourire discret aux lèvres.

Un autre se fait finalement leader, normal, il en sait plus. Et à mesure qu’il parle, vois comme les visages s’émacient. C’est la merde intégrale, notre nanopan de l’humanité le saisit très très vite. Et voilà qu’il se met à maudire les restrictions budgétaires, et tout le monde avec lui ! Une station de merde mal foutue, avec des capsules de ravitaillement si rares et merdiques, et pourquoi qu’une seule merde comme site d’arrimage ? Et pourquoi à l’extrême extrémité de cette poubelle orbitante ? Et pourquoi y a pas de bras télécommandé à cet endroit là ? Et pourquoi y a pas de sas là-bas non plus ? Les Terriens qui commettent un crime contre l’humanité, à coups de bouts de papiers filigranés et de comptes en banques. C’est le krach humain de la Bourse !

Certains crient, certains brandissent le poing, certains se bastonnent avec, certains s’accroupissent, certains ont peur que le ciel leur tombe sur la tête, certains prient Dieu pour qu’il n’existe pas -veulent pas de punition-, certains se scarifient, certains sont sortis de la salle, certains sont partis baiser, certains ont fermé les yeux, certains sont morts, certains sont partis réinformer les désinformés, certains sont revenus en enfance avec des envies de boisson –Molotov, qu’ils appellent ça-, certains se foutent de la gueule du monde, les autres noient leur désespoir dans la poursuite de leur incantation maudite budgétarienne. Un seul est parti aux chiottes, mais il nous intéresse pas. Un seul se rebelle contre la lâcheté du nanopan pitoyable de l’humanité. La pitoyabilité étant une grandeur intensive, on peut l’étendre à l’humanité elle-même…

C’est celui-là qui souriait tout à l’heure en tremblant.
Personne ne se bouscule au portillon pour tirer tout le monde d’affaire, pourtant, si personne ne se bouge, personne ne se tire d’affaire. Le calcul est à ce point décevant pour que le petit pan suicide le plus grand pan ? Notre singulier personnage fait s’arrêter toutes les courtes pailles qui, telles qu’elles sont parties, gaspilleront bien deux heures. Bah oui, avec toutes les accusations de tricherie…
Il se désigne. Il assure qu’il n’est pas le plus mauvais des spationautes, mais qu’il préfère tenter le petit rien pour le tout pour éviter de crever avec le reste du monde, image qui l’horripile, en voyant un tel désastre pré-apocalyptique.
Certains soufflent, certains veulent sabrer le champagne tout de suite, certains partent chercher un flingue et le reste l’accolade chaleureusement.

Allez c’est parti. Une équipe se constitue, se bouge, on a la niaque. Certains s’occupent du suivi des signes vitaux, certains des conditions de la mission, certains planifient tout (et dans ceux-là, l’un s’est endormi), certains ont les yeux dans le vague toutes les deux secondes, certains scrutent leur écran avec tellement d’intensité qu’ils se croient les seuls à œuvrer pour la sauvegarde du cocon mortifère merdique qui abrite quelques millions de larves purulentes : leurs semblables. Et celui qui nous intéresse toujours pas loupe la cuvette.

Le héros du jour est parti enfiler son attirail. « Vingt-huit heures grosso modo » qu’il a dit le leader de pacotille. Passé ce délai la nourriture manquera, le carburant manquera, les purificateurs d’air manqueront, les générateurs à courant ellipsoïdaux auto-azimutés et la casserole à pression sous-focalisable manqueront. C’est vraiment la merde. Heureusement qu’on sent rien dans l’espace.
Notre homme est emmené dans le sas le plus proche du lieu de l’incident. On lui file un grappin et surtout on lui dit rien. « T’as signé » que ça veut dire. En tout cas si ses calculs sont bons, il est bien à plus de deux kilomètres de l’extrémité du bras de la station. Ça veut dire deux bornes à se taper dans l’espace. Hé, ça veut pas dire deux bornes à fouler des graviers en regardant l’herbe verte et les mouches qui batifolent. Ça veut dire être la mouche, et batifoler tout seul n’est pas possible : le théorème de la main droite ne s’applique pas sur une région enveloppée d’une combinaison d’astronaute, c’est con.
Le voilà largué pour la mission-suicide. Son cœur, effet naturel d’un lâché dans l’espace (on parle ici d’abandon), se la joue cent quarante à la minute, comme le voient certains. Aucun œil n’est braqué sur lui. Peu savent qu’un abruti apeuré mais souriant s’évertue d’ores et déjà à les sortir du mauvais pas.
On lui signale par radio qu’il y a des échelons à intervalles réguliers tout au long du bras. On lui signale aussi qu’il n’y aura aucun câble pour lui sauver la mise, parce que les câbles de deux kilomètres de long, ils n’en ont pas. On lui signale qu’il dispose de vingt-quatre heures d’oxygène. Il se signale que ça correspond exactement à l’ultimatum, et que ça ça veut dire « tu rentres pas avant d’avoir terminé… ou tu ne rentres pas ». On lui signale qu’il a un paquet de gâteau dans une poche latérale s’il a un petit creux durant la mission. Il signale que s’il s’agit d’une poche extérieure à sa combinaison, il ne pourra pas faire passer les gâteaux à travers la visière de son casque ni ouvrir ce dernier sans risquer avec de fortes probabilités une dépressurisation potentiellement responsable d’une agonie mettant en danger la vie de celui qui voulait manger les gâteaux. Autrement dit : petit creux deviendra grand. On ne lui répond pas.

Un grappin avec un lance-grappin, des échelons. Si l’utilisation d’un tel engin sur Terre n’est pas forcément aisée, les conditions spatiales n’arrangent rien. L’apesanteur a de jouissif qu’elle soustrait de toute force autre que la vôtre, qu’il s’agisse d’action ou de réaction. Songez qu’ainsi, il devient difficile d’imprimer des trajectoires courbes aux projectiles, or voilà un effet sur lequel joue un grappin. Peut-être sous ces lumières peut-on voir le soulagement lamentable d’un homme dont nous nous désintéressons totalement comme autre chose que de la maladresse. Si seulement il avait été en état d’apesanteur…
Douze heures. Songez à un autre phénomène ennuyeux : votre grappin conservera globalement sa vitesse une fois propulsé dans le vide, faiblement ralenti par la mise en mouvement de la corde à laquelle il est attaché. Cela signifie qu’une fois celle-ci tendue, elle ne le restera pas et jouera le rôle d’élastique, perturbant de facto notre pauvre petit grappin livré à lui-même, qui ne pourra que constater son inutilité latente. Il faut donc faire preuve d’une dextérité exemplaire pour parvenir à ses fins.
Douze heures auront été nécessaires pour parvenir à attraper le premier échelon. Parmi elles, il y aura eu en moyenne quatre heures d’essais motivées par l’imminence d’une fin, vingt minutes à pousser des jurons, quarante minutes à rapatrier la corde après chaque échec, trente minutes à contempler les étoiles sans une seule pensée constructive, quinze à tripoter fébrilement le mousqueton assurant la fixation du héros afin que le héros s’assure de sa fixation assurée à la porte du sas, évitant ainsi un aller simple pour le Rien, ainsi que, comme certains en ont fait si correctement le compte, sept heures quinze de recueillement afin de retrouver la sérénité après l’échec. Chaque séance de recueillement se voyant suivie par une séance de contemplation stellaire parfaitement inutile, mais c’est dans la nature humaine de s’égarer.
Pendant ce temps, dans l’équipe de soutien de la mission, certains ont arrêté de soutenir, certains de ceux-là ont préféré le breuvage -dont la recette est tenue secrète- nommé whisky-coca, certains la belote, certains la pelote. Certains issus de la campagne de réinformation sont venus donner leur soutien en intégrant l’équipe de soutien, d’autres sont venus donner leur soutien en soutenant l’équipe de soutien de soutenir la mission qui, depuis douze heures il faut bien le dire, commençait à vaciller sur ses échelons. Certains ont d’ailleurs mis le grappin sur autre chose que des échelons, d’autres ont trouvé des créneaux. La confusion règne donc parmi le nanopan de l’humanité de la station.

En fait, la confusion règne tout court. N’oublions pas que le grand pan de l’humanité qui gravite est en proie à une entrecroise de furieux flux de désinformation et de réinformation (ce qui suscite la question du « MAIS ON VA CREVER OU PAS À LA FIN ?? ») comparable au joyeux méli-mélo d’un air froid et sec du Canada et d’un air chaud et humide du Mexique au-dessus de la bande Texas-Oklahoma-Kansas : on a l’impression d’assister au passage d’une tornade F5 dans tout ce bordel. Ah elle est belle la station.
Un seul habitant échappe à la confusion, et il n’est pas au petit coin, c’est notre bon vieux chasseur d’échelons, et il se rend compte que les gravir n’est pas simple, même si c’est la voie du succès. Il est tendu comme une ficelle, comme un string dirait l’autre, like a string dirait Neil. Oh, pas par nervosité, c’est simplement que son mousqueton assurateur le retient d’un côté tandis qu’il tire sur la corde de l’autre, et lorsqu’on tire trop sur la corde… enfin, ici c’est pour maintenir le grappin en place, donc n’allez pas le traiter d’idiot. Il vire lentement le mousqueton d’une main et cette libération joue le rôle de faible catapulte. Il s’y attendait mais la seconde de flottement qu’il vient de laisser échapper vient d’anéantir toute chance de rejoindre l’échelon : la corde s’est déjà distendue et le grappin devenu inutile.
Constatant cela sur les écrans de contrôle, certains s’arrachent les cheveux, certains fondent en larmes, certains partent avec certains du soutien de l’équipe de soutien qui s’étaient ramenés avec quelques bouteilles de champagne, beaucoup font la teuf, certains ne font que se crisper en voyant l’espoir s’amenuiser encore pour approcher du zéro absolu négatif. Treize morts sont à déplorer suite à l’événement dramatique : trois par pendaison, un par balle et responsable de trois autres par balles, une noyade dans un saladier rempli d’eau, un sur la piste de danse et deux par électrocution télévisuelle en tentant de traverser l’écran pour se sortir du guêpier. Notons aussi l’envoi par colis postal artisanal grossièrement scotché et pourvu de deux pétards-fusées en guise de propulseurs d’un chiot de deux mois en ligne directe (comprenez qu’on vise à l’œil l’adresse Terrienne cible, qu’on installe dans le sas, qu’on allume les mèches et qu’on ouvre) vers l’Igloo numéro quatre, rue des Inuits, quartier Groenlandais, dans le but secret de marquer un panier à trente-trois gigapoints à travers Arecibo. Il est des temps où l’éthique dont fait preuve les Hommes face à l’expérimentation est considérablement remise en question.

Notre héros de l’espace dérive, selon une trajectoire trop proche du bras de la station pour se considérer définitivement perdu, trop loin pour pouvoir rectifier le tir sans difficulté. Si la panique s’est tout d’abord emparée de lui, il a su s’en dégager en une dizaine de minutes. Il l’a dit, il n’est pas trop mauvais spationaute. Son sang-froid revenu, il analyse la situation tandis qu’on le voit défiler devant les hublots. Il possède un grappin et un paquet de gâteau qui pousse au suicide involontaire. Il doit à nouveau saisir un échelon pour s’en sortir, mais il est mouvant, à une vingtaine de mètres du bras de la station. Son lancer doit être ni trop fort pour limiter les échecs, ni trop doux pour éviter de gaspiller du temps dans la lenteur des tentatives. C’est l’engrenage, le dilemme ultime en temps limité. La recherche du compromis entre précipitation et excès de précision agrémenté de l’erreur de jugement et de la maladresse humaine. Le choix lui-même subit le compromis, entre une décision hâtive qui supprimerait ses chances et une décision trop mûrement réfléchie qui laisserait la station s’éloigner sans même agir. C’est un très mauvais choix.

Certains s’anesthésient le gosier à grosses lampées, certains vont se coucher, certains vont prier, certains vont manger, certains vont rêver, certains vont oser, certains vont s’enfermer, certains vont se recroqueviller, certains vont s’exhiber, certains vont ruminer. Certains regrettent déjà, et surtout les spationautes… sont-ce là aussi de très mauvais choix ?

Lui a trouvé. Il y a mieux. Le lancer quasiment derrière lui, un peu comme s’il utilisait un parachute. Laisser le grappin s’éloigner pour rejoindre la station de manière quasi-parallèle. Ainsi, plus besoin d’ajuster la longueur de la corde. Ainsi, par simple frottement, il pourra freiner l’avancée du grappin progressivement de manière à garder la corde tendue. Ainsi, le grappin effleurera la station sur toute la longueur qu’il reste encore. Reste à ce que le grappin soit correctement mis sur la route des échelons, mais même cela, il a le temps de faire plusieurs essais pour se faire la main. Espoir dans un nouveau choix.
Cent soixante-cinq pulsations par minute. Certains lui demandent de se calmer. Il rétorque que les missions-suicides et les missions de plus de sept heures ne sont pas monnaie courante, et qu’il se trouve exceptionnellement calme dans une telle situation. Il rajoute après un instant que les missions non assistées, puisque qu’il n’avait jamais entendu une radio aussi muette, n’ont pas le droit d’exister. On ne lui répond pas. Elles le prennent donc, ce droit.

Après vingt-cinq minutes supplémentaires de dérive dont quinze pendant lesquelles le grappin a avidement mordu la coque de la station, et pendant lesquelles notre spationaute a croisé mentalement les doigts d’au moins soixante-dix hommes -orteils compris- en plus des siens (le théorème du croisement des doigts n’existe pas, mais se référer quand même à celui de la main droite pour les restrictions d’application), ledit grappin a fini par se coincer, non dans un échelon, mais dans une quelconque aspérité de la coque, et cela est tout aussi bien. L’éternel terrifié en dedans mais calme au demeurant sourit et regarde furtivement parmi l’obscurité quel est l’astre unique qui constitue sa bonne étoile. Mais peut-être n’en a-t-il pas, après tout. Il a maximisé de lui-même ses chances de survie. Il ressent avec bonheur l’accélération qui résulte de l’à peu près arc de cercle qu’il décrit et qui l’envoie tout droit vers l’interface station - module de ravitaillement.
Certains sont partis pisser, certains ont pissé sans y aller, certains se sont retournés dans leur lit douillet, certains reprennent du courage, certains se plaignent du prix de la peinture spéciale revêtement spatial lorsqu’ils songent aux éraflures longues d’on ne sait combien de mètres qui traînent maintenant sur le bras de la station, certains se plaignent parce que ce seront eux qui devront repeindre mais ils jurent déjà qu’ils feront grève si on les force à y aller sans conditions de travail plus sécurisées car ils n’ont pas envie de faire joujou avec cordes et grappins. Un seul ne s’est jamais posé la question, et il est dehors.

Les difficultés ne font pas que s’effacer. Les heures s’égrènent et avec elles, le travail s’accomplit, bien qu’il devienne de plus en plus pénible. Le spationaute ne fait qu’inspecter minutieusement l’interface à la recherche de la faille, car celle-ci n’est pas évidente : à première vue, tout semble normal. Ses yeux parcourent le fatras des pièces métalliques qui s’imbriquent les unes dans les autres, et cela lui demande une concentration soutenue. Il est à bout, à tous point de vue. L’enjeu a fait naître en lui un professionnalisme dont il ne soupçonnait pas lui-même l’existence. Car cela fait bientôt vingt heures qu’il est sorti. Son cœur indique cent quatre-vingt, de sa peau s’échappe de la sueur à grosses gouttes. Chaque geste devient une lutte de tous les instants, effets contre-intuitifs de l’apesanteur. Il s’est encordé à la taille, mais la prise du grappin est éloignée, ce qui l’oblige à s’accrocher manuellement comme il peut pour travailler.
Nerveusement, il a atteint ses limites. Effets conjugués de l’apesanteur, des vingt heures hors station, de l’ultimatum, des complications, de son effort de concentration, de sa solitude. Il frôle maintenant l’instabilité psychologique.
Il porte la main à sa boîte à outils à sa ceinture et en tire un tournevis, bien entendu raccordé à la boîte par un fil de nylon blanc pour éviter toute échappatoire. Il a repéré une pièce qui a tout l’air de dépasser de manière suspecte. Il la démonte fébrilement et l’effort lui arrache encore un peu d’énergie. S’échappe alors du mécanisme une pièce de monnaie.
Il la contemple un petit moment, tournoyant dans le vide, et finit par éclater violemment de rire, ce qui le fait souffrir.
Un grand compte en banque pour l’homme, une petite pièce pour l’humanité. Ils avaient raison ! C’est le krach humain par la Bourse !
Il remonte le mécanisme et le contact se fait, et le ravitaillement s’effectue. Un simple contact manquant.
Tous hurlent de bonheur. Tous célèbrent la victoire. Tous informent tout le monde et infligent leur contre-réinformation. Certains baisent, certains boivent comme des trous, certains dorment, certains pleurent, certains jouent aux cartes, certains prient Dieu pour qu’il existe -veulent le remercier-, certains puent le joint, certains sont à poil, certains rangent leurs appartements sens dessus dessous, certains se calment, certains s’agitent. Qu’est-ce qui a changé, en fin de compte ?
L’équipe de soutien réunit le soutien qui l’a soutenu, ainsi que tous les cloportes qui se sont cassés, excepté le type des WC qui a fini la tête dedans. Il reste trois heures d’oxygène à notre Héros. Il est convenu que tous s’y mettent pour le tirer de là, en formant une chaîne humaine et en réunissant un peu de matos.
Un nom circule déjà sur toutes les lèvres, et c’est le Sien. Il est déjà Grand. Au fond de lui, il sait déjà tout cela. Il dira qu’une pièce était coincée, mais ne précisera jamais qu’il s’agissait d’une pièce de monnaie. Autant conserver plus de prestige…

Deux heures se sont écoulées et la chaîne humaine a progressé intelligemment. Ils sont bientôt à son niveau. Il a réfléchi.
Le bout de la chaîne lui arrive tout droit dessus. Il est si fatigué, il ne peut plus bouger le petit doigt, mais étrangement, son exploit a déclenché quelque chose qui l’a maintenu éveillé, malgré tout. Le spationaute qui va le saisir est à moins de dix mètres. Le Héros lui sourit et, grâce aux nouvelles visières, l’autre le remarque et sourit à son tour.
Ça y est. Il a choisi. Il s’est lancé.
Personne n’avait eu le temps de remarquer qu’il avait défait l’encordage. Il a pris son impulsion sur la coque, et s’éloigne à une vitesse qui paraît folle de tous.

« - Mon Dieu, Stern ! Qu’est-ce qui te prend ?!
- C’est le mal de l’espace, la fatigue ! Il devient dingue ! »

Rien de tout ça. Stern coupe la radio. Stern a tenu bon. Stern a fait son boulot et s’en est tiré avec les honneurs. Que ces honneurs pérennisent, mais par pitié…

Qui sont ces gens ?
Certains sont idiots.
Certains sont en caleçons.
Certains ont des épis.
Certains brandissent le poing.
Certains noient leur désespoir dans la poursuite de leur incantation maudite budgétarienne.
Certains s’occupent du suivi des signes vitaux.
Certains…

…les yeux dans le vague…
…larves…
…whisky-coca...

Certains ont d’ailleurs mis le grappin sur autre chose que des échelons.
Certains s’arrachent les cheveux.
Certains vont s’enfermer.


Certains regrettent déjà, et surtout les spationautes…


Qui sauve l’humanité ? Certains, et ce n’est pas certain. En tout cas pas tous. Pas tous ceux qui sont venus Le chercher, une fois qu’ils avaient une raison à donner à leur conscience pour le faire. Ne viennent-ils pas d’ailleurs de prouver qu’ils étaient parfaitement aptes à gérer la situation, bien mieux que le pauvre seul Stern ? Et ils ne s’en rendent même pas compte. Même pas.
Stern la sauve lui, l’humanité. Il préfère tenter le petit rien pour le tout pour éviter de crever avec le reste du monde.

La station n’est déjà plus grand-chose dans Son champ de vision. Il aurait pu vivre, se laisser sauver. Il veut arrêter le cours de sa vie maintenant. Il veut cette mort-là. Il n’est plus terrifié, mais il a gardé le sourire, il sait ce qu’il fait. Il vivra en tant que Héros, mais plus en tant qu’homme. Il ne veut pas crever avec le reste du monde, même si celui-ci continue de tourner. Surtout s’il continue de tourner…

…Freedom…

Son Apothéose.

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Créé le 01/11/2008 à 17:43:04 - Modifié le 01/11/2008 à 17:44:30
[Un petit jeu en ligne centré sur un monde post-apocalyptique, peuplé de hordes de zombies.
Classique. Et hop ! Allez savoir pourquoi, je suis quand même parti sur une improvisation complète.
Pas de thème musical pour cette fois !]



Murmure




Invraisemblable. Impossible. Nous étions une armada bourrée d'équipements, mais ces cadavres ambulants parviennent tout de même à gagner du terrain. Je ne comprends pas.

Je ne comprends pas comment ces pauvres bestioles dénuées d'intelligence finissent par percer toutes nos défenses. Elles ne sont pas de fins stratèges. Elles ne possèdent aucune puissance de feu. Elles sont lentes. Elles ne sont pas blindées.

On s'est retranchés, moi et mes troupes, dans une vieille gare ferroviaire. L'endroit n'est pas si ajouré que ça : la plupart des accès ont été barricadés par des planches. On sent qu'elles ne viennent pas d'être posées : elles doivent avoir servi dès le début du Cataclysme.
S'il n'y avait qu'elles, nous serions dans une situation critique... mais le deuxième étage n'est accessible que depuis deux escalators, et il nous offre d'imprenables postes de tir en surplomb. Ici, nous ne sommes pas dans une situation critique, au moins. Juste une situation précaire. Et c'est déjà un soulagement.
Le supermarché n'est pas loin, il est là, à moins de deux cent mètres en continuant sur la voie d'en face. C'est notre stock de bouffe. L'occuper directement serait une grave erreur, cela ne ferait qu'attirer les morts-vivants là-bas. On n'a pas besoin de ça.
Alors à chaque début de pénurie, on forme un petit groupe, on l'équipe soigneusement en armes, on lui gonfle le moral et on l'y envoie.

Oui, bien sûr, deux cents mètres, ce n'est rien. Que celui qui lit ceci se détrompe : ce n'est pas rien la peur au ventre et l'œil en permanence dans le réticule. On sait que s'il y en a un, une bastos entre les deux yeux suffira. S'il y en a deux, il en faudra deux. S'il y en a trois, c'est peut-être sept ou huit chargeurs que nous perdrons, et quatre hommes. Réfléchissez, ces êtres humains ont beau n'être que l'ombre d'eux-mêmes, ils n'ont pas perdu leurs sens. Le vacarme les attire. D'ailleurs, l'odeur les attire, le mouvement aussi...
C'est alors que vous comprenez que ces deux cent mètres sont les pires de votre vie. Et c'est votre vie qui tient à les franchir en marchant. Courez, criez, sprintez, et vous êtes mort. Et vous êtes tous morts.

Graham me dit qu'il a réussi à bidouiller une locomotrice pour y remettre le jus. Je bénis ses notions de mécano. J'ai repéré des wagons-container, on pourrait en atteler et se mettre dedans.
Qu'est-ce qui serait le mieux ? Le laisser tel quel ou l'usiner pour se fabriquer quelques lucarnes ? Dans tous les cas, on roulerait battants ouverts, c'est évident, mais... bon dieu que c'est dangereux. Pas de circuler container ouvert, mais la situation engendrée dans les deux cas.
Un train, c'est lent. Si on s'arrête en terrain occupé, le temps de repartir, on sera assailli. Des lucarnes, c'est autant d'accès à l'intérieur et d'angles à défendre. Pas de lucarne, c'est un seul accès étroit comme un couloir où beaucoup seraient inutiles, et un piège à rats. Que faire ? Je vais en discuter avec les gars.

La hiérarchie, ça n'existe plus trop. Je suis le plus gradé, et je suis un leader naturel, pourtant, j'aurais été bien con de n'en faire qu'à ma tête. Oh ils auraient tous suivi, ils sont disciplinés... mais il y a tellement de pièges en ce bas-monde que je ne veux pas être le seul cerveau à fonctionner pour y échapper. C'est peut-être pour cette raison qu'on a tenu si longtemps.
Vous me demanderez pourquoi vouloir bouger alors qu'on s'est trouvés un petit coin de paradis ? Tout simplement parce qu'on a pas assez de munitions. Oh, on en a hein ! A la pelle même. Mais un seul raid, c'est une guerre. Elle peut durer une heure, dix heures, trois jours. On n'a jamais assez de munitions.
Ça me fait penser...
Je comprends, maintenant. C'est idiot, je n'avais pas réalisé mais... ils ont faim. C'est tout. C'est ce fait unique qui rend le combat si inégal. Ils ont juste faim. Ils ont faim et cela affûte leurs sens, leur agressivité. Ils ne connaissent pas le sommeil.
Nous non plus.

Alors on va se tirer d'ici et tenter de se trouver de quoi tenir plus longtemps. Si on reste en vie, on reviendra : l'endroit est trop parfait pour faire une croix dessus.
J'ai envie de pleurer. Je sais que tous les autres aussi. Je ne sais pas si je ne dois pas maudire Graham, finalement. Je ne veux pas partir d'ici. Je ne veux pas avoir à explorer un nouvel Enfer inconnu, peut-être grouillant, peut-être pas, sans rien connaître des lieux. J'en ai marre de sécuriser des zones.
Sécuriseur de zones. C'est le seul métier d'avenir maintenant. Le seul qui donne une perspective d'avenir. Nous formons une famille, nous nous battrons. Même si l'avenir, on ne sait pas vraiment en quoi il consiste aujourd'hui. Ou plutôt si, mais c'est une pensée taboue. Et bien sot qui, sous prétexte que nous vivons une époque moderne, briserait ce tabou-là. Ce tabou, c'est un sceau mental. Celui qui nous empêche de péter les plombs.
Le mot "survivre" ne doit jamais se former clairement dans notre esprit. La vie pour la survie n'est jamais du goût de l'espèce humaine. C'est peut-être en cela qu'elle transcende toutes les autres races d'êtres vivants, ces morts-vivants plus que tout le reste encore.

Nous devons quitter cet endroit. Mon chargeur est plein, mon matos est prêt. On est à quatre pour surveiller chaque côté de la voie ferrée. La gare étouffe le son, seuls les zombies s'aventurant dans le prolongement des rails entendront distinctement la locomotrice que Graham va mettre en marche.
Oui, il faut penser à tout. C'est l'ironie, quand on lutte contre des décérébrés. Il faut être plus intelligent encore que contre un adversaire humain...

Nous tous, n'avons jamais été si discrets de toute notre vie que pendant ces deux ans. Même faire l'amour est devenu un acte silencieux. A le rendre insipide. Même cela, les zombies parviennent à nous le gâcher.
La Terre est un autre monde. Un Outre-Monde. La Terre est un monde de vie qui se cache.
La Vie, c'est le bruit. La Mort, c'est le silence.


Je vis dans un monde en paix où règne la guerre contre le bruit.


C'est moi qui mène cette guerre.
C'est donc un peu moi qui lutte contre la vie. Paradoxe pas si paradoxal qui me retourne les entrailles.

Mais chut... Je pense déjà trop fort.
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Créé le 21/12/2008 à 00:09:46 - Pas de modification
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